Sortir de la culpabilité

Couverture2Pendant une formation, Mathilde, retraitée, raconte comment, à 20 ans, elle a voulu protéger son petit frère en l’empêchant de regarder la télévision. Elle se souvient l’avoir attrapé dans le fauteuil et l’avoir traîné avec violence loin de la télévision. En racontant cela, Mathilde est submergée par une forte émotion, évoquant la répétition fréquente de cette stratégie dans des relations qu’elle voudrait pourtant bienveillantes. Quelques jours après, elle m’écrit la prise de conscience qu’elle vient de faire : « J’ai pris conscience de cette culpabilité récurrente qui me fait ressasser mes échecs relationnels parce que je mets en place des actes violents alors que je souhaite des relations empreintes de bienveillance réciproque. » J’ai écrit ceci à Mathilde :

La prise de conscience que tu as faite est importante pour toi : tu as découvert que ton intention était juste – protéger ton petit frère -, mais que la stratégie était violente quand tu as éloigné ton frère de la télévision. Cette distorsion entre ton intention et la stratégie employée a généré de la culpabilité qui se réactive dans de nombreuses autres relations… depuis plus de 40 ans !

Cette prise de conscience a déjà transformé ta tristesse en enthousiasme. Il suffit que tu sois vigilante et que tu continues, « d’écouter plus loin chez moi », comme tu l’écris si bien. Certaines de tes réactions vont changer toutes seules. Tu y sentiras un goût de liberté. Et quand tu auras la tentation de retomber dans les réactions du passé, tu pourras parfois t’arrêter. D’autres fois, tu recommenceras comme avant : ne t’en désole pas ! La « rééducation » prend du temps, on ne se défait pas d’un seul coup des stratégies du passé devenues des automatismes.

Chaque fois que tu te sens coupable, cherche l’intention positive derrière l’erreur !

L’enjeu, c’est de tenir ensemble deux postures différentes : d’une part garder la fermeté : elle fixe des repères et des limites, elle refuse ce qui peut détruire, elle manifeste son désaccord, elle dénonce l’injustice, elle exerce l’autorité légitime qui nous est confiée… et d’autre part et dans le même temps la bienveillance qui favorise des relations sincères où l’autre se sent reconnu et valorisé.

Ces deux postures sont-elles contradictoires ? Oui quand, centrés sur notre seul intérêt, nous jugeons la personne au lieu de dénoncer l’acte ; et la fermeté se transforme en violence.

Ces deux postures sont complémentaires : la fermeté et la bienveillance sont comme les deux jambes qui permettent de tenir en équilibre et d’avancer. Un jour, des élèves adolescents en grande difficulté me parlaient d’un professeur dont ils se moquaient en disant : « C’est un bouffon ! Il nous laisse faire n’importe quoi ». Puis ils me parlaient d’un autre professeur qu’ils aimaient bien : « Il est sévère, mais il nous respecte ». Et ils expliquaient : « Sévère, ça veut dire qu’il ne nous laisse pas faire n’importe quoi. Mais il nous respecte parce qu’on peut toujours parler avec lui et il nous fait réfléchir à nos actes. » Fermeté et bienveillance déclenchent alors le respect mutuel et le bien-être relationnel.

Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
Mars 2014

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