Souvent en nous, des sentiments contradictoires se mêlent. A tel point parfois que nous ne savons plus où nous en sommes… Par exemple des sentiments de colère, de tristesse, de déception… et des sentiments de soulagement et de liberté. Selon les moments de la journée, nous passons instantanément de l’un à l’autre, où nous nous sentons « tiraillés » de l’un à l’autre…
Qui d’entre nous n’est jamais en tension contradictoire entre des choix à faire, des décisions à prendre, des attractions et des répulsions vis-à-vis de la même personne… ?
Une personne m’écrit récemment qu’elle reconnaît en elle deux postures contradictoires : la difficulté à accorder sa confiance qui la fait fuir à chaque sollicitation, et en même temps sa volonté de faire plaisir qui fait d’elle une proie facile pas assez méfiante…
Une autre me dit qu’elle se sent libérée et sans manque suite à une rupture amoureuse, et en même temps qu’elle a peur, si elle revoit son « ex », d’être attirée et de retourner avec lui…
Faut-il lutter quand nous sommes affrontés à des tensions et contradictions intérieures ? Faut-il toujours que les sentiments reconnus nobles l’emportent sur ceux qui nous paraissent négatifs ? Faut-il que la libération l’emporte sur la colère ou que le soulagement vienne à bout de la tristesse et de la déception ? Quand nous sommes dans ces sentiments ou postures contradictoires, nous nous traitons facilement de « girouettes » qui changent d’avis au moindre souffle et nous nous jugeons
Un ami m’écrit que tous les soirs en se couchant, il est résolu à dire ce qu’il veut vraiment à un proche… et que tous les matins au réveil, il ne trouve pas les moyens ou l’énergie de prendre la parole… Et il se traite lui-même de « lavette »…
Lutter n’est pas la bonne solution. Croire que la libération est bonne et que la colère est mauvaise est une erreur. Croire qu’un choix est bon et l’autre mauvais est la meilleure manière de se tromper de décision. Car le monde n’est pas divisé en bien et mal, bon et mauvais… Il y a en chacun des énergies capables de nous faire avancer, il y a des moteurs dans les émotions négatives comme dans les émotions positives.
Derrière les plus gros nuages, il y a toujours le soleil. Derrière la colère, il y a la capacité à dire non à l’inacceptable. Derrière la tristesse d’une rupture, il y a la valeur de la confiance donnée et de l’amour partagé. Derrière la peur, il y a le désir de réussir. Derrière le choix de la séparation, il y a le besoin d’autonomie et de liberté et parfois aussi de protection. Ces énergies cohabitent. Nous en faisons l’expérience chaque fois que nous nous sentons tiraillés entre deux pôles, deux décisions, deux ressentis… car nous ne sommes pas faits « tout d’une pièce » !
Il n’y a pas à choisir entre les deux, mais à accueillir et écouter chacun de ces pôles. Comme une lampe électrique a besoin des deux pôles, la phase et le neutre, pour s’allumer… Ces deux pôles peuvent faire de la lumière ou du court-circuit, mais aucun des deux n’est mauvais, les deux sont nécessaires !
Accueille chacun de ces ressentis, fais droit à chacun et distingue l’un de l’autre, sans jugement ni culpabilité. Écoute ce que chacun de ces pôles contradictoires dit de toi, de tes aspirations et de tes refus, de tes blessures et de tes espoirs, de tes échecs et de tes réussites, et de ces valeurs différentes qui se croisent au cœur de ton être. Écoute ce que chacun veut de bon pour toi. Même ta colère qui te fait dire non veut du bon pour toi, car sans elle tu ne retrouverais pas ta liberté, ou tu accepterais l’insupportable… Si tu ne cherches pas ce que ta colère veut de bon pour toi, tu risques de transformer cette colère en violence sur toi ou sur l’autre !
Lorsque tu auras accueilli tes contradictions et écouté ce que chaque pôle veut de bon pour toi, tu pourras les faire dialoguer, les mettre en négociation, et tu découvriras que ce qui t’apparaissait comme contradictoire peut maintenant coopérer, comme la phase et le neutre de l’électricité. Tu ne seras plus tiraillé, mais tu y ressentiras une nouvelle unité intérieure, nourrie de la diversité de tes courants…
Il y a quelques temps, une personne me parlait de ses grandes blessures intérieures depuis son enfance jusqu’à aujourd’hui. Après plusieurs rencontres où elle avait eu des discours très distanciés sur les évènements déclencheurs de ses blessures, elle a pu enfin exprimer ce qu’elle ressentait… jusqu’à une sensation douloureuse dans son ventre d’un grand tourbillon. Au quotidien, ce tourbillon la submerge, jusqu’à des colères destructrices. Elle venait de mettre des mots sur ses ressentis, de les écouter et de les exprimer, et son ventre se mettait aussi à parler en forme de tourbillon. Puis elle a mis ses mains sur son ventre, elle a pris ce tourbillon dans ses mains, plutôt que de se laisser prendre par lui. Elle fut toute étonnée de le ressentir aussitôt dans ses mains comme un filet d’eau qui caresse… Et quelques jours après, elle écrit : « Les choses s’apaisent et ça fait beaucoup de bien, même si c’est encore fragile. J’espère continuer … »
Marc THOMAS, Consultant Formateur en Compétences relationnelles,
13 août 2015
Je trouve cela très vrai, Marc. Tous nos ressentis disent quelque chose de nous, y compris des choses que nous préférerions nous cacher à nous-même, peut-être. Il n’y a pas longtemps, j’ai constaté qu’un dégoût que j’avais me parlait, en fait, mais en creux… C’est amusant parce que j’ai retrouvé ça dans la spiritualité ignatienne, qui prête attention au « jeu » des consolations et des désolations. Je ne développe pas mais c’est vraiment tout à fait la même idée, avec un vocabulaire différents, bien sûr.
Merci Françoise ! Oui je connaissais la proximité avec l’esprit ignatien. C’est aussi très présent en PNL où je l’ai expérimenté…
à laisser infuser !
Merci.