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Et si nous acceptions le manque ?

Un accident de bateau dans le Canal de Suez :
certains rayons dans les supermarchés de la Réunion sont vides,
et déjà des plaintes s’expriment
et des accusations à ceux qui auraient mal géré la crise.

Il gèle en avril dans les vignes et les vergers français :
2/3 de la récolte vont manquer dans certaines régions.
Quand les producteurs impactés demandent des aides,
je pense à tous les sous-traitants dont l’économie est encore plus fragile…

Les restrictions sanitaires restreignent drastiquement les voyages.
Je n’ai pas pu prendre de vacances en Métropole depuis 18 mois.
J’ai aussi refusé de faire de faux certificats à des métropolitains
qui voulaient à tout prix venir sans vrai motif impérieux.

Ces manques déclenchent des déprimes, des angoisses,
mais aussi des colères, des accusations,
et des exigences hautement réclamées…

Comme si « les autres » étaient coupables de nos manques
et devaient les combler immédiatement,
comme au temps où nous étions au ventre de notre mère !
Comme si « les autres » auraient du anticiper
ce que personne ne pouvait prévoir…
Comme si « les autres » n’avaient pas le droit à l’erreur
que nous nous attribuons si facilement à nous-mêmes…

Heureusement ces manques suscitent la solidarité
nationale, institutionnelle, citoyenne, familiale, entre voisins…
Heureusement, des associations, des syndicats, des citoyens
ne se contentent pas de récriminer contre les puissants
mais se liguent pour créer les conditions de l’équité et de la justice.

Nos ancêtres à tous ont appris à s’adapter aux facéties de la nature
le plus souvent par leurs propres énergies et avec peu de moyens.
Leurs manques non supportés ont déclenché guerres et inégalités,
quand leurs manques acceptés ont permis d’inventer des stratégies de survie.

Mes parents qui venaient de se marier furent séparés pendant 5 ans
quand mon père était prisonnier de guerre en en Allemagne !
Ils ont choisi de transformer leur manque en solidarité,
découverte par mon père comme condition de survie dans les camps de prisonniers,
mise en œuvre par ma mère dans la protection des jeunes lorrains contre les bombardements.
Ils n’ont pas reçu d’indemnités et ne se sont pas laissés aller à la rancœur,
choisissant ensuite de promouvoir la réconciliation franco-allemande.

Des parents consacrent toute leur énergie
à soutenir leur enfant malade, handicapé ou en échec,
transformant leur manque et leur détresse en amour salvateur.

Des personnes confinées et des entreprises en télétravail
ont inventé par eux-mêmes d’autres modes de communication,
transformant des échanges superficiels en relations de qualité.

Depuis un an, la Covid m’a fait perdre 80% de mon travail
sans compensation  du fonds de solidarité ces derniers mois,
alors qu’à 73 ans, je dois encore travailler pour vivre…
Grâce à ce manque, je nourris ma passion
pour l’écriture partagée et pour l’écoute empathique.

Des citoyens, des élus, des décideurs,
affrontés aux manques suscités par cette pandémie
et aux limites de notre civilisation consumériste,
choisissent de ne pas attendre d’être assistés,
mais de changer de vie pour remplacer
le chacun pour soi par la solidarité,
la consommation à tout va par le respect de la planète,
la course à la réussite à tout prix par la qualité de vie.

NOUS AVONS LE CHOIX :
nous lamenter ou accuser les autres de ne pas satisfaire nos manques,
ou trouver dans ces manques l’énergie de refaire surface,
de passer d’un manque d’avoir à un plus d’Etre,
et de chercher et offrir le soutien nécessaire à nos fragilités mutuelles.

Et vous, que choisissez-vous ? Que diriez-vous de tout cela ?

Marc THOMAS
mthomas@competences-relationnelles.com

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voir aussi :
Solidaires face à l’épidemie de la peur