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N’aie pas peur d’avoir peur… de l’autre

LA PEUR DE L’AUTRE…

Peur de la violence de l’autre, de son autoritarisme, de son imprévisibilité, de sa manipulation… Cette peur nous entraîne souvent à nous soumettre au bon vouloir de l’autre, à nous adapter à ce qu’il attend de nous au point de faire taire ce que nous sommes vraiment. Elle nous conduit à ne pas pouvoir dire non, à satisfaire les besoins de l’autre et bien souvent à nier nos propres besoins.

Certains se taisent et subissent, persuadés qu’ils paieraient cher toute résistance. Mais cette attitude risque au contraire de nourrir la violence de l’autre, prenant plaisir à écraser quelqu’un qui se laisse faire. Quant aux personnes autoritaires, regardez bien : elles ne sont pas autoritaires avec tout le monde et baissent souvent le ton devant celles et ceux qui savent dire non et résister sans violence. Se taire et subir risque de nourrir la domination de l’autre. En nous taisant et en acceptant, nous devenons même complices de la violence de l’autre. Les femmes qui subissent des violences conjugales dans le silence pendant des années savent que leur silence ne règle pas la violence. C’est seulement quand elles osent enfin parler qu’elles peuvent s’en sortir et mettre fin à la soumission.

Certains voudraient se « blinder », ne plus avoir peur… Mais ceux prennent cette posture se raidissent et deviennent souvent durs et violents… parce que derrière leur armure, la peur continue à bouillonner.  Il y a de rares cas où une armure est nécessaire : les policiers ne prennent le bouclier que lorsque la violence déborde, mais ils le déposent quand la vie quotidienne reprend son cours normal. Alors que bien souvent, même en période calme, nous n’arrivons plus à quitter les armures de méfiance, de jugements et de rancœur derrière lesquelles nouas cru devoir nous réfugier…

Se protéger vraiment, c’est s’ouvrir : s’ouvrir à des relations solidaires, et ouvrir les yeux sur une autre face de la réalité.

Se protéger par la solidarité : il n’est pas possible de faire face à la violence et à l’autoritarisme tout seul. C’est ensemble qu’on peut faire front. Pour résister au pouvoir oppresseur, Gandhi a rassemblé des foules qui ont su dire non et résister avec des pratiques sans violence. Dans les entreprises, le chacun-pour-soi est dévastateur ; quand les salariés sont solidaires et quand les syndicats et représentants du personnel défendent le droit du travail, le respect des personnes et la justice sociale progressent. Et la peur régresse…

Se protéger en changeant de regard sur les personnes violentes, autoritaires, manipulatrices. Nous croyons trop souvent que les violents sont forts et les autoritaires puissants. Et nous, nous sentons-nous puissants quand nous frappons nos conjoints ou nos enfants ou quand nous sommes autoritaires ? Non ! Nous devenons violents et autoritaires quand nous ne sommes à bout, quand nous ne supportons plus de ne pas obtenir ce que nous voulons. Un chef autoritaire qui refuse toute discussion est quelqu’un qui a peur de perdre son autorité s’il vous demande votre avis ! Et nous savons tous que l’autoritarisme développe les congés maladie et la résistance, et  qu’un chef respectueux et à l’écoute de ses salariés développe de la motivation et de l’efficacité !

Face à un chef autoritaire, nous pouvons utiliser une stratégie sans violence en deux mouvements : d’abord l’empathie et la reconnaissance qui peuvent le rassurer parce qu’elles lui montrent que je ne viens pas mettre en cause sa légitime autorité ; ensuite l’affirmation de soi qui exerce son droit à la parole tout en prenant en compte la peur du chef. Cette stratégie en deux temps pourrait s’exprimer de la manière suivante: « C’est vous le chef et à la fin c’est vous qui déciderez ; alors quel risque y a-t-il à ce que je vous partage mon point de vue ou mon avis ? ».

N’aie pas peur d’avoir peur !
Ta peur te protège et te rend fort, non par la violence, mais par le souffle intérieur !

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
2 avril 2016

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Mon enfant intérieur

Cette personne m’envoie la photo d’elle quand elle était petite fille et m’écrit :

Elle :
Tu reconnais cette petite fille?
C’est une photo qu’un membre de ma famille a retrouvé. …
Elle me parle beaucoup !

Moi :
Oh oui je la reconnais bien !
Elle te parle de quoi ? (si ce n’est pas indiscret !!!)

Elle : Je ne sais pas trop définir,  j’ai été comme hypnotisée par ce regard fixe et cette figure triste. J’ai eu envie de caresser cette petite fille, de lui donner de la tendresse. De lui dire et donner tout ce que j’aurais voulu que l’on me donne à ce moment de ma vie (sans savoir vraiment si je n’avais pas cela mais  je n’ai pas de souvenir précis de mon enfance, en tout cas pas de moment joyeux et tendre)

En regardant cette photo de nombreuses questions me sont venues.

C’est comme si j’avais pu voir mon enfant intérieur … voilà en quoi cette photo me parle beaucoup.
Maintenant je ne sais pas trop ce que je dois faire avec ça … peut être rien !
En tout cas je la trouve belle cette petite fille !

Moi :
Quand j’ai vu la photo, ça m’a sauté aux yeux immédiatement : la beauté et la souffrance.
Je n’ai rien voulu te dire tout de suite pour ne pas influencer ton regard.
Mais ce que tu m’écris correspond bien à ce que j’ai senti…
Cette petite fille que tu portes en toi depuis toujours… et dont la souffrance émergeait souvent en toi ces dernières années…

Elle est très juste ton envie de « caresser cette petite fille et de lui donner de la tendresse ».
Fais-le, sans réserve !

En lui donnant aujourd’hui la tendresse dont elle a manqué, tu vas lui permettre de cicatriser ses souffrances et de sortir de la tristesse…

Maintenant, cette belle petite fille, cette souffrance ou cette tristesse, tu peux en prendre soin tendrement. Ainsi tu vas les réintégrer et les transformer en énergie dans ton élan d’aujourd’hui…

Chemin de larmes, peut-être, mais chemin de bonheur…

Elle :
Merci, Marc, je suis émue…

Moi :
Bien à toi, Marc…               Jaillissement130x81        mthomas@competences-relationnelles.com

PDF1et merci à cette personne de m’avoir autorisé à partagé cet échange de courrier
pour qu’il puisse servir à d’autres

 

 

Écoute active

Lettre à une amie…

Ce que tu dis sur l’écoute sonne juste à mes oreilles : « parfois, juste l’écoute est nécessaire, et en parlant la personne se libère et trouve elle-même les solutions. » Je suis témoin de cela très souvent. C’est la merveille de l’écoute qui laisse l’autre autonome sur son chemin de libération.

Tu ajoutes qu’il faut du temps, et tu prends l’exemple de la pause sur un banc pendant une randonnée. De la même manière, je prends souvent l’exemple des semailles faites à l’automne, et de ces longs hivers où il semble qu’il ne se passe rien, sinon la froidure… et pourtant c’est le temps nécessaire pour que s’enracinent les pousses du printemps… Dans cette dimension de l’écoute, l’accompagnant marche à côté ou même derrière l’écouté, il marche au pas de l’autre qui est le vrai pilote de l’avancée.

Cette dimension de l’écoute « au rythme de l’autre » est capitale, mais à elle seule, elle n’est pas l’écoute active.  Car une deuxième dimension est nécessaire : il s’agit alors de la partie plus directement « active » de l’écoute : il s’agit ici de refléter à l’autre une part de ce qu’il a exprimé ou manifesté mais qu’il n’a pas « entendu » lui-même. Il peut s’agir de faire remarquer à l’écouté un élément qu’il semble n’avoir pas vu ou avoir laissé de côté… ou de relever un mot qui semble étrange dans le contexte de ce qu’il dit… ou de lui répéter les premiers mots d’une phrase qu’il n’a pas terminée… Cette démarche peut être parfois bousculante pour l’écouté car elle le met parfois devant ce qu’il cherche encore à éviter.

Mais cela ne peut se faire que si l’écouté peut avoir l’énergie de réagir à ma « bousculade ». Et je vais solliciter sa réaction et l’accueillir telle qu’elle vient : « Qu’en penses-tu ? ou plutôt… pour t’encourager à ne pas trop mentaliser sur tout ça ( !) : que ressens-tu en lisant cela ? »

Et à nouveau, entendant sa réaction, je vais reprendre l’attitude de l’écoutant qui marche derrière : je ne vais pas d’abord chercher à lui expliquer ce que j’ai voulu, et encore moins chercher à lui « faire comprendre » quoi que ce soit : ce faisant, je me remettrais au centre, comme celui qui sait et prend le pouvoir sur l’autre.

Je vais au contraire accueillir sa réaction, et le laisser choisir où il veut aller dans cette nouvelle étape… même si cela ne correspond pas à ce que j’imaginais…

Parce que c’est lui, l’écouté, qui est au centre… et c’est lui, l’écouté, qui pilote…

Bien à toi…

Marc                         Jaillissement130x81                 mthomas@competences-relationnelles.com
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Si tu veux aider, ne donne pas de conseil !

Jaillissement130x81ACCOMPAGNER COMMENT ? 

Il vous est sûrement arrivé d’être en difficulté ou de ne pas savoir quelle décision prendre et d’en parler à un proche… Parfois, celui-ci ne vous écoute pas jusqu’au bout et vous dit : « A ta place, je ferais ceci ou cela… » ou encore : « Tu devrais… » Et souvent cette réponse ne vous satisfait pas… Continuer la lecture de Si tu veux aider, ne donne pas de conseil !

Attention à nos interprétations !

Couverture2Je devais arriver chez une proche que je vois une fois par an et avec qui les relations sont parfois difficiles. Comme convenu entre nous, je lui téléphone pour annoncer mon arrivée vers 16h. Elle me répond : « Nous allons à la plage à 16h. Si on n’est pas là, tu trouveras la clef à tel endroit. » Je ne dis rien, mais je rumine : « Ca fait un an qu’on ne s’est pas vu, et elle ne peut même pas changer son programme de loisirs pour être là pour m’accueillir. » Il s’en suit toute une liste de pensées négatives qui réactivent les souvenirs de relations tendues avec elle : une fois de plus, je ne compte pas à ses yeux… Elle ne pense qu’à elle…

J’ai fini par arriver. Elle n’était pas allée à la plage car il pleuvait ! Le lendemain, son fils et ses petits enfants s’annoncent pour 17h après toute une journée de route. Ses petits enfants sont tout pour elle. Et je l’entends répondre à son fils au téléphone : « D’accord mais on va à la plage à 16h, vous trouverez la clef à tel endroit… ou bien rejoignez-nous à la plage. » Je suis surpris : elle agit avec ses petits enfants qu’elle adore comme avec moi !

Première découverte : je me suis trompé hier en interprétant son absence comme un rejet de moi. C’est seulement sa manière à elle de vivre et de gérer ses priorités.

Vers 16h15, nous sommes en route pour la plage et son fils appelle à nouveau : « nous serons là dans une demi-heure. » Elle répond : « on va à la plage, rejoignez-nous ! » Dans ma logique à moi, je lui dis : « Si ton fils et tes petits-enfants arrivent, on peut rentrer à la maison pour les accueillir ». Elle me répond : « Non, il connaissent la maison et ils peuvent nous rejoindre à la plage ».

Deuxième découverte : sa manière d’accueillir n’est pas la même que la mienne. J’aurais changé mon programme pour accueillir ceux qui arrivaient chez moi. Elle invite ceux qui arrivent à la rejoindre pour partager ce qu’elle est en train de vivre. Nous sommes différents, nous n’avons pas les même priorités.

Je continue à avoir du mal à comprendre qu’on ne change pas son programme, quand c’est possible, pour accueillir ceux qui arrivent. Mais au nom de quoi pourrais-je la juger ? Moi, je lâche mes activités pour accueillir l’autre et je n’ai pas envie de changer cela. Elle invite l’autre à la rejoindre dans ses priorités et, signe de confiance, laisse l’autre ouvrir sa maison et s’installer chez elle-même en son absence. Qui a tort ? Qui a raison ? Personne ! Chacun de nous vit à sa manière le lien entre ses priorités et ses relations.

Dans cette situation simple de vacances et de tensions relationnelles, j’ai beaucoup appris à vivre dans le quotidien ce que je transmets en formation : nos interprétations parlent d’abord de nous et du sens que nous donnons aux comportements. Malheureusement, nous nous servons de ces interprétations qui parlent de nous pour juger les autres, sans même chercher le sens qu’eux-mêmes donnent aux actes qu’ils posent !

La prochaine fois que tu vis une tension relationnelle, au lieu de partir d’emblée à juger l’autre, demande-toi d’abord : comment j’interprète cette situation ? Qu’est-ce que ça dit de moi, de mes priorités, du sens que je donne à mes actions ? Et ensuite seulement essaye de constater et de comprendre – et pas de juger – comment l’autre fonctionne et quel sens il donne à ses comportements. Tu constateras des différences. Il pourra y avoir des désaccords. Mais plus de jugements ni de rumination qui ne sont que de l’autodestruction !                   

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
août 2014

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Sortir des reproches pour entrer en dialogue

Couverture2Nous traversons tous des périodes de tensions interpersonnelles. Parfois nous y sommes enfermés. Nous passons alors notre temps à faire des reproches à l’autre, à parler de lui en l’accusant et en le jugeant. Que d’agressivité et de violences morales ou physiques en découlent !

Il suffirait que chacun parle de lui-même pour sortir de la spirale infernale qui conduit à la dénonciation et au jugement.

« Tu m’as blessé » pourrait devenir : « Quand tu dis cela, je suis blessé. »

« Tu racontes n’importe quoi » pourrait devenir : « Je ne suis pas d’accord avec toi. »

« Tu ne m’écoutes jamais » se dirait : « J’ai besoin de te parler, peux-tu de m’écouter ? ».« Tu te moques de moi » deviendrait : « Je ne me sens pas respecté. »

Continuez la liste… Entraînez-vous à « parler en Je »… et constatez les effets :

D’abord vous vous êtes respecté vous-même : vous avez pu parler de vous, de vos constats, de vos ressentis et de vos besoins, et exprimer vos demandes et propositions.

En même temps, vous avez quitté le terrain de l’agressivité en ne parlant plus de l’autre sous forme de reproches et de jugements. Du coup, il y a davantage de chances qu’il ne vous retourne pas cette agressivité… D’abord surpris par votre changement de posture, il peut être davantage prêt à reprendre un dialogue apaisé.

De plus, vous avez commencé à traiter le problème : vous avez pu distinguer l’impact sur vous de la situation : votre perception, vos ressentis, vos limites, vos refus… Et vous êtes davantage prêt à entendre quelle était l’intention de l’autre : voulait-il vraiment vous blesser ? ou ses paroles ont-elles fait résonner en vous des douleurs mille fois ressassées ? Et même si l’autre était vraiment agressif, le fait d’avoir pu exprimer votre ressenti et vos limites vous permet de vous sentir davantage protégé : vous allez découvrir que son agressivité ne parle que de lui et de son mal-être.

On m’a appris jadis que dire « Moi, je… », ce n’est pas bien. C’est exact quand le « Moi je suis le meilleur », par exemple, sous-entend que les autres sont moins bons que moi. « Parler en Je », c’est distinguer dans la relation ce qui vient de moi et ce qui vient de l’autre ; c’est permettre à chacun d’exister et d’exprimer ce qui le traverse, sans projeter sur l’autre des intentions qui ne parlent finalement que de mes interprétations. C’est parce que je peux parler de moi-même et de la manière dont je vis la relation que je suis prêt à écouter l’autre parler de lui-même et de la manière différente dont il vit la relation. Tous les reproches et les jugements sont évacués et les différences peuvent s’exprimer et être entendues.

« Le tu tue » disait le psychologue Gordon. Les « Je » partagés suscitent le respect de chacun et permettent à la relation de se construire dans la sérénité et la complémentarité.               

Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
Juin 2014

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Restaurer le dialogue

FCouverture2rançoise* parle de son fils adolescent : depuis quelques mois, il ne parle plus. Il travaille bien à l’école, mais lorsqu’il rentre à la maison, il va directement dans sa chambre, et il n’en sort que pour manger. Françoise lui reproche ce silence, et tel ou tel de ses comportements qui ne lui conviennent pas.

Mais elle souffre de cette situation et se trouve totalement démunie, craignant que son fils aie de mauvaises fréquentations et se mette à faire des bêtises comme le font d’autres adolescents. Alors elle multiplie les mises en garde, elle interroge son fils pour vérifier qu’il ne fait pas de bêtises, elle lui demande sans cesse pourquoi il s’enferme dans sa chambre. Mais elle se heurte toujours au même silence.

 Dans le même temps, Françoise participe à une formation professionnelle à la gestion de conflits. Elle y apprend les dégâts causés par les reproches et les accusations projetées sur l’autre. Elle y apprend aussi à « parler en je », c’est-à-dire à exprimer ce qu’elle a perçu des faits, ce qu’elle ressent, ce dont elle a besoin, ce qu’elle demande à l’autre ou ce qu’elle refuse… On lui avait tellement appris qu’il ne fallait pas dire « moi je » qu’elle s’en sortait avec des « tu » accusateurs qui finissaient par tuer la relation.

De retour chez elle, elle s’est mise à « parler en je » et à exprimer ses ressentis devant son fils. Elle raconte : « J’ai mis ce qui faisait mal à plat. » Elle disait ses préoccupations, ses espoirs, ses souffrances, elle parlait de ses émotions… Quelle ne fut pas surprise de voir son fils rester là pour l’écouter, puis lui répondre qu’il était là et qu’elle n’était pas toute seule avec ses difficultés.

Loin de repartir s’enfermer dans sa chambre comme avant, son fils s’est ensuite mis à parler aussi de ce qu’il vivait à l’école : ses copains qui lui reprochent de ne pas venir avec eux fumer de la drogue ou boire de l’alcool, l’étonnement de ses copains parce qu’il n’avait pas de copine… Et puis il a dit aussi qu’il voulait repartir dans la région où ils vivaient avant parce qu’il avait laissé là-bas ses meilleurs copains.

Et depuis ce jour où Françoise a quitté le « tu » accusateur pour le « je » qui exprime, un dialogue régulier s’est réinstauré avec son fils. Elle discute avec lui de son orientation scolaire et il accepte de faire avec elle les démarches nécessaires pour préciser cette orientation. Elle peut aussi lui dire son désaccord, et même parfois les limites ou les règles que tout parent peut poser à son enfant… Cette juste autorité n’interrompt pas le dialogue, mais elle s’intègre dans une relation nouvelle où chacun peut être lui-même et exprimer ce qui est important pour lui, dans le respect et l’écoute mutuels.

Merci à toi, Françoise, et à ton fils, de nous montrer qu’il est toujours possible de reprendre le dialogue. Entre vous deux, c’est allé vite, car ton fils était lui aussi dans l’attente d’un dialogue où il se sentirait respecté. Ce n’est pas aussi facile pour tout le monde : l’habitude prise de se taire a pu figer toute parole, ou bien les tensions sont si fortes que la méfiance ne disparaît pas du premier coup.

Et pourtant, chaque fois qu’une personne quitte les reproches pour exprimer ses propres ressentis, l’autre encore dans la méfiance est surpris par le changement de posture. Le moment venu, cela rendra possible la restauration progressive d’une relation. Un regard bienveillant permet d’entretenir l’espoir, d’attendre patiemment que vienne le moment… et de continuer à s’exprimer de façon sereine et constructive.                   

Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
Avril 2014

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Écouter plus loin

Couverture2Je suis allé chez un ostéopathe pour une sciatique de la jambe gauche. Je signale au praticien un détail supplémentaire : j’ai comme des décharges électriques dans un doigt de la main gauche depuis une chute. Surprise : il s’occupe d’abord du détail, le doigt (« mais ce n’est pas d’abord pour ça que je suis venu ! »). Puis il remonte vers l’épaule : c’est elle qui est bloquée et qui est la cause de tout le reste !

L’ostéopathe pose délicatement ses mains sur l’épaule, le bras, le poignet, le déplace le long des points sensibles et des circuits d’énergie et, sans faire mal, jusqu’au bassin, jusqu’à ce point qui faisait mal avec la sciatique.

 Au bout de quelques minutes d’une manipulation très douce, je sens une détente dans le l’épaule et le bras, et un grand bien être dans tout le corps. Je ressens physiquement une tension libérée et une sorte de courant d’énergie. Au même moment, l’ostéopathe me dit : « ça lâche ! »

 Il termine son travail sur mon coude, toujours avec délicatesse, mais une douleur se fait sentir. Il me dit « c’est bien verrouillé, il faudra plusieurs séances pour que ça lâche complètement. » Puis il m’invite à me relever, en me prévenant qu’il est normal que je sente des courbatures dans les heures et jours prochains.

 Sur la table de travail de l’ostéopathe, j’ai pensé que l’écoute et l’accompagnement ont quelque chose à voir avec l’ostéopathie… Dans des accompagnements individuels, nous venons souvent évoquer des problèmes douloureux dont nous ne savons pas comment sortir. Ils sont tellement envahissants qu’ils occupent tout le champ de notre conscience. Souvent l’écoutant nous interpelle sur une parole qui nous paraît être un détail insignifiant ; ou bien il nous invite à chercher dans notre mémoire émotionnelle et mentale d’autres évènements qui ont pu déclencher les mêmes réactions que celles d’aujourd’hui. Nous voudrions qu’il nous apporte la solution au problème d’aujourd’hui, mais il nous oriente avec délicatesse sur ce qui a pu le déclencher et qui vient de plus loin

La personne qui nous écoute nous accompagne pour identifier le problème et son origine. Sans jugement, sans interprétation, sans nous prendre en pitié, sans non plus souffrir avec nous. Mais avec délicatesse, dans une présence attentive. Cette attitude merveilleuse, qui s’appelle l’empathie, suffit souvent à nous permettre de trouver les clefs de nos verrous et de nos ruptures.

Nous nous sentons alors moins écrasés, allégés et libérés, même si la solution n’est pas encore trouvée. Ce travail demande du temps, pour enlever les sédiments accumulés, toutes ces résistances et blocages qui nous ont peut-être protégés au fil des ans, mais en nous verrouillant de l’intérieur. Grâce à l’écoute empathique, l’énergie libérée par notre parole nous a soignés. Sans la main de l’ostéopathe, je ne peux pas libérer le blocage de l’épaule. De même, depuis des années peut-être, nous n’avons pas a réussi à sortir tout seul du problème qui nous verrouillait : c’est quand notre parole est accueillie et écoutée qu’elle devient libératrice.

 Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
Février 2014

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Symphonie

Couverture2Sept petites notes, pas une de plus. Rien que sept notes : do-ré-mi-fa-sol-la-si, tout simplement, avec leurs nuances, de dièse en bémol… Mais que de combinaisons possibles à l’échelle des octaves, au génie de l’artiste. Sept notes, chacune unique, originale, en chaînes infinies, pour autant de mélodies toujours nouvelles jouées sur tous les instruments.

Ainsi les hommes aux multiples couleurs du corps et du cœur, comme autant de notes uniques, originales. Ainsi la vie de chacun, mélodie enchaînant les graves et les aigus sur tous les rythmes. Ainsi l’humanité, orchestre symphonique où chaque instrument est à la fois indispensable et insuffisant.

Vivre : devenir soi en découvrant sa propre note, en l’accueillant sans regretter les autres ; toute la mélodie serait « court-circuitée » si ma note venait à manquer, ou si je pensais devoir avoir la même tonalité que tout le monde.

Comment trouver la note juste sans diapason ? Car la justesse vient d’ailleurs : dans la vie comme en musique, c’est en écoutant que je m’ajuste. Les plus beaux instruments s’accordent fréquemment.

Puis viendra le temps de déchiffrer la partition encore inconnue : elle ne sera musique que par mon interprétation : jouer ma partition pour « enchanter » le monde.

Vivre : laisser passer ma note originale par les vibrations et les résonnances de mon corps et de mon être. Et transformer ma note originale en musique dont je suis l’instrument. Instrument à vent, à cordes ou à percussions ? Lyre délicate ou cymbale sonore ? Je n’ai pas choisi mon instrument, pas plus que mon sexe ni ma taille ! Il s’agit d’abord de me laisser apprivoiser par cet instrument reçu en héritage, de me familiariser avec sa sonorité et ses règles, avec ses possibilités et ses limites, puis de « faire mes gammes », prenant ma place au milieu des vivants. Alors un jour imprévu, au détour d’une expression personnelle, surgira une création ! Les plus belles improvisations sont pétries de travail.

Vivre : entrer dans la symphonie, dans le concert de l’humanité : harmoniser nos instruments et nos partitions, écouter les autres voix pour pouvoir chanter juste, choisir de suivre le même rythme, sous la baguette d’un chef d’orchestre. Alors, tour à tour ou ensemble, chaque instrument donne toute sa mesure, celui-ci apaisant, celui-là éclatant ; ceux-ci accompagnant le soliste qui, sans eux, n’aurait pas de corps ; ceux-là dialoguant en des sonorités diverses et complémentaires. Ou encore solistes dont la voix s’élève pour appeler en écho la réponse du chœur. Tour à tour foisonnement et paix, gravité et légèreté. Heureuses différences !

Tout homme est mélodie. Toute vie est appelée à être mélodieuse. L’humanité en marche est symphonie.

Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
juillet 2013

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Communication bienveillante

Couverture2Confrontés à une situation relationnelle difficile, chacun de nous à tendance à vouloir se justifier ou à chercher à convaincre l’autre : « tu as tort, j’ai raison » ou encore « il faut que je lui fasse comprendre… ». Nous nous acharnons parfois… même si nous avons déjà fait l’expérience que ces stratégies de passage en force ne marchent pas.

La « Communication Non Violente » inventée par Marshal Rosenberg est une méthode garantie sans violence pour permettre d’entendre l’autre et d’être entendu, même en situation difficile. Il s’agit d’un processus en 4 étapes que j’ai traduites de la manière suivante :

  1. Qu’est-ce qui s’est passé ? Il s’agit des FAITS, ou plutôt d’exprimer et d’accepter les points de vue légitimement différents de chacun. Plutôt que de chercher qui a raison ou tort, il s’agit de rechercher la complémentarité de nos différents points de vue.
  2. Qu’est-ce que ça m’a fait ? Qu’est-ce que ça t’a fait ? Il s’agit des RESSENTIS, très importants à exprimer car ce sont eux qui motivent nos réactions et, souvent, nourrissent agressivité et rancœur… Ces ressentis parlent de l’objet actuel du désaccord, mais surtout ils réveillent des souvenirs douloureux d’autres situations vécues dans d’autres contextes, non traitées et réactivées aujourd’hui.
  3. De quoi j’aurais – tu aurais besoin pour être bien ? Il s’agit ici des BESOINS humains fondamentaux tels que A. Maslow les a décrits : survivre, être en sécurité, être relié à d’autres humains, être reconnu et valorisé, s’accomplir… Ces besoins déclenchent nos ressentis et émotions, selon qu’ils sont satisfaits ou insatisfaits. Ces besoins-là sont toujours légitimes et doivent être pris en compte. Les faire taire multiplierait stress et mal-être.
  4. Qu’est-ce qu’on fait ? Quelles demandes exprimer ? Quelles solutions envisager ? Si les besoins de chacun sont exprimés et reconnus, il n’y a plus de violence. Mais la violence reviendrait si je faisais pression sur l’autre pour l’obliger à me satisfaire. Mes besoins sont légitimes, mais leur satisfaction est de ma responsabilité. Je peux demander à l’autre, mais pas l’obliger, sinon il serait soumis à mon besoin. Ici peut s’ouvrir une négociation constructive dans une relation respectueuse : les besoins de chacun seront nommés et pris en compte, l’autonomie de chacun sera valorisée, et des solutions nouvelles seront élaborées.

 Ainsi, en 4 étapes à la portée de tous, on aura abandonné le rapport de force où chacun cherche à avoir raison et à prouver que l’autre a tort. Chacun avait au départ sa version des faits et campait sur ses positions. Les 4 étapes auront permis de construire ensemble une 3ème version des faits basée sur nos complémentarités : chacun aura lâché un peu de sa « position » figée pour gagner ensemble, avec respect, une stratégie commune prenant en compte les besoins de chacun. Cette relation-là a de l’avenir !

 Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
mai 2012

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2 interview sur la Communication non violente :