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Lâcher prise

Photo-couverture600Françoise (prénom d’emprunt) participe à une formation destinée à retrouver du sens et à oser être soi-même. Elle me rappelle qu’elle a déjà participé au début d’une autre formation avec moi, mais qu’elle est partie le midi du premier jour car elle ne supportait pas de voir tous les autres participants « pleurnicher parce qu’ils ne savent pas dire non, car moi, continue-t-elle, j’ai appris à être forte et je sais dire non… »

Pendant la première matinée, Françoise exprime son doute que la formation lui fasse trouver du sens à sa vie et intervient beaucoup, interrompant les autres pour leur donner des conseils pour se défendre contre les agresseurs, disant qu’elle, elle sait être forte en toutes circonstances… Plusieurs fois je tente de cadrer et de canaliser les prises de paroles de Françoise. A la pause elle m’invective : « Dans toutes les formations, je me sens bien, sauf dans les vôtres, car vous m’empêchez de parler et vous me frustrez ». Je lui exprime la nécessité pour moi de garantir la parole de tous dans le groupe, et j’ajoute : « Tant que vous parlerez si souvent pour conseiller les autres, je pense que vous ne réussirez pas à trouver le sens de votre vie » « Et pourquoi ? » me dit-elle vivement. « Car pour trouver le sens de sa vie, il faut d’abord écouter et accueillir ce que votre être intérieur a à vous dire. Plus vous parlez des autres, moins vous pouvez vous entendre ».

Françoise est quand-même revenue l’après midi, sans changer beaucoup de posture, exprimant toujours son doute sur « vos capacités à me faire trouver le sens de ma vie ». Je lui rappelle que c’est à elle d’aller le chercher et que je ne peux que lui proposer des « outils » pour se mettre à l’écoute d’elle-même. Elle répète plusieurs fois que « pour s’en sortir dans notre monde et au travail, il faut être fort,  faire face et ne pas se laisser déstabiliser. » Les autres l’interrogent sur sa méthode et elle répond : « Moi je ne me laisse pas faire et je réponds du tac au tac ». Le ton dur à tonalité agressive ne convainc personne…

Le lendemain matin, Françoise est revenue. Chaque participant est invité à exprimer ce qui lui a tourné dans la tête et le cœur depuis la formation de la veille. Françoise prend la parole pour dire qu’elle n’a toujours pas trouvé le sens de sa vie.

Une de ses collègues, Clotilde (prénom modifié) l’interrompt : « Eh bien moi j’ai trouvé hier le sens de ma vie. Depuis des années je me sentais anormale, parce que je n’avais pas envie ni besoin de faire des projets pour changer ma vie, parce que je n’avais pas envie d’acheter toutes les nouvelles choses qui paraissent… Je me disais que je n’étais pas comme les autres, et j’étais triste. Hier le formateur m’a accompagné dans la découverte suivante : je n’ai pas besoin de faire toujours plus de choses, ni d’avoir toujours plus, mais je suis heureuse de la vie que j’ai dans la simplicité, sans avoir besoin de courir après des bonheurs artificiels… Alors quand le formateur m’a demandé ce qui me rend heureuse comme ça, et quels sont ces besoins satisfaits qui font mon bonheur, j’ai répondu : j’ai besoin d’être dans la sérénité, de l’ancrer en moi. J’ai découvert hier que mon bonheur n’est pas dans le faire, ni dans l’avoir, mais dans l’être. » Et Clotilde ajoute : « Hier soir, j’en ai parlé à mon mari tellement j’étais contente. Et je lui a dit : ça fait dix ans que je vais chez le psy pour comprendre pourquoi je ne suis pas comme les autres et pour tenter de devenir normale, et grâce à quelques questions, j’ai mis le doigt sur mon bonheur d’être ce que je suis, et j’ai retrouvé le sens de ma vie. » Émotion des participants…

Est-ce ce témoignage qui va ouvrir une première brèche chez Françoise ? Quand je lui redonne la parole là où elle avait été interrompue (elle disait n’avoir toujours pas trouvé le sens de sa vie), avec sa verve habituelle, elle dit pourtant quelque chose de tout neuf : « Vous savez je suis forte au travail, tout le monde me voit forte… mais quand je rentre chez moi, je ne suis plus forte du tout… » Son visage change. Je lui propose de continuer. « Par exemple, j’avais juré à mon chien que je serais auprès de lui jusqu’au bout de sa vie. Quand il s’est retrouvé sur la table du vétérinaire, je ne sais pas ce qui m‘a pris : je suis sortie sans réfléchir. Vous voyez je ne suis pas forte, au contraire j’ai été lâche. » Et le visage de Françoise est crispé.

Nous avions convenu en début de formation qu’il n’y aurait aucun jugement de porté, ni sur les autres, ni sur nous-mêmes, car les jugements ne résolvent jamais rien et ne font qu’aggraver les situations.

Je propose donc à Françoise de retirer ce jugement sur elle-même. Elle résiste, affirmant sa grande lâcheté. Je lui dis : « si vous vous jugez, vous ne saurez jamais pourquoi vous n’avez pas pu rester jusqu’au bout auprès de votre chien. » Regard étonné, puis humide. « Vous êtes-vous déjà demandée, Françoise, ce qui vous a poussé à partir ? » Françoise qui parlait tant et à tout propos n’a plus de mot. Ses larmes coulent : elles semblent vider une souffrance… Enfin Françoise s’interroge elle-même, sans jugement, et j’entends dans s bouche : « Pourquoi ? » Je vois dans son regard vers moi un appel. Me branchant sur la souffrance que je ressens, je lui suggère : « C’était trop dur ? » Ses larmes coulent davantage : « Oui je n’ai pas pu, j’avais trop mal, je n’étais pas assez forte pour supporter cela, j’étais trop faible ». Percevant un nouveau jugement sur elle-même dans ce mot « faible », je lui dis : « Vous n’étiez pas faible, vous vous sentiez peut-être seulement fragile, blessée, touchée au plus profond.. Et rester était au-delà de vos forces. »

Les larmes de Françoise continuent à couler. Elle dit : « Depuis 10 ans, je n’ai jamais pu pleurer. Depuis la mort de mon père, jamais de larmes. J’aurais voulu lâcher, mais je n’y arrivais pas… » Je dis à Françoise : « Peut-être vous êtes-vous réfugiée derrière la force d’une armure, mais aujourd’hui vous venez de découvrir une part de vous que vous ne connaissiez pas : la fragilité de tout être humain, les limites du supportable… Vous êtes en train de devenir vous-mêmes, à la fois forte et fragile et le mélange des deux va vous permettre de tenir debout toute seule : plus besoin d’armure extérieure ! A la place, la force intérieure, la force souple et fragile vous permettra enfin de vivre plus sereine. »

Françoise pleure toujours, sans arrêter. Elle sort de la salle, son amie la rejoint. Le groupe qui a été témoin de tout cela a besoin aussi d’une pause. Quelques minutes après, Françoise vient vers le groupe et dit : « Je pleure mais c’est du bonheur, je pleure parce que ça vient de lâcher… Oh merci ! Vous le formateur qui m’énerviez tant hier, vous m’avez permis ça ! » Je lui réponds : « Je vous ai canalisée hier par respect pour le groupe, mais aussi parce que je pensais que c’était la seule solution pour que vous vous mettiez à l’écoute de vous-même… »

Tout le reste de la journée, Françoise était épuisée, mais son visage rayonnait. L’épuisement de quelqu’un qui vient de vider une tension de plusieurs années. L’épuisement de quelqu’un qui vient de lâcher la tension du bras de fer qu’elle avait engagé avec la vie… Il va lui falloir quelques jours pour découvrir en elle, à travers cette fatigue et cette détente, la souplesse et la sérénité que donne l’alliance réconciliée de la fragilité et de la force intérieure.

Alors Françoise, le sens de ta vie ? !!!
Et vous amis lecteurs, où vous êtes-vous reconnus ?
Dans quelle part de vous êtes-vous touchés par cette histoire ?

Marc THOMAS, Consultant formateur en « Compétences relationnelles »
juin 2016

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Avant de publier cet article, je l’ai envoyé à « Françoise » pour lui demander son accord. Après l’avoir lu, elle m’a écrit cette très belle lettre (en bleu) et je lui ai répondu en insérant mes réponses (en gris) dans son texte :

Je vous remercie de prendre de mes nouvelles.
Quand je lis ce texte, et bien les larmes coulent.
Je suis bien, très zen, relaxée                c’est très bon signe !

Je ne saurai jamais comment vous remercier. Je suis encore étonnée de ce qui s’est passé. Comme vous l’aviez dit, peut être que j’étais enfin prête ?             oui

Je ne crois pas au hasard mais au destin, et le destin a fait que je vous ai croisé.
Je ne sais pas pourquoi je suis restée à la formation et pourquoi je suis revenue le lendemain. Je ne me l’explique pas.
Mais quel bonheur de l’avoir fait : même un psy n’aurait pas fait mieux en bon nombre d’années.
Votre être intérieur en partie inconscient sait pourquoi vous êtes restée à la formation et il a été assez « fort » (d’une vraie force, bien différente de celle que vous connaissiez avant !) pour vous guider dans votre décision de rester.

De temps en temps je repense à la situation, le mot lâcheté revient mais je le chasse aussitôt et repense à ce que j’ai réussi à dire
Ne chassez pas ce mot de « lâcheté », accueillez le même avec bienveillance comme on accueille un enfant blessé… Mais soignez le en continuant à écouter et à chercher ce qui se cache derrière ce jugement sur vous : et ce qui s’y cache est probablement la découverte d’une vulnérabilité à accepter, d’une souffrance ancienne à cicatriser, d’une fragilité à accepter pour qu’elle vienne assouplir vos raideurs…

Oui je suis forte mais j’ai mes limites. j’ai tout fait pour rendre heureuse ma chienne et malheureusement je n’ai pas pu l’accompagner jusqu’au bout car j’étais seule, sans défense, choquée
Voila déjà une parte de ce qui se cache derrière ce que vous jugiez avant comme une lâcheté : votre solitude, votre vulnérabilité sans défense, un choc qui parle non seulement de la disparition de votre chienne mais aussi d’une blessure en vous…

Je ne m’en veux plus. Je suis enfin en paix. Que c’est bon !
Donc vous avez déjà abandonné le jugement pour vous accueillir avec bienveillance

Je ne vous oublierai jamais et j’espère que l’on pourra se retrouver dans une autre formation. Bon, je serai toujours aussi « chiante » mais lorsque vous me recadrerez, je n’aurais plus la même attitude de renfermement, de vexation, de frustration.

Vous m’avez beaucoup appris. C’est incroyable, VOUS êtes incroyable
Ce que j’ai fait pour vous ne tient pas à je ne sais quel pouvoir magique ni talent exceptionnel : c’est seulement la conséquence d’une posture que j’ai apprise : l’écoute avec le cœur qui à la fois cherche à discerner la blessure derrière les raideurs et les jugements, et canalise et parfois refuse les débordements…Si vous apprenez à vous écouter vous-mêmes, puis à accueillir l’autre sans jugement ni conseil, vous deviendrez progressivement capable de vivre la même attitude…

Le texte est magnifique, bien sûr utilisez le !       « Françoise »

« Vider » et « lâcher » plutôt que retenir

« Pour l’instant, j’ai encore trop de colère en moi, trop de ressentis que je n’arrive pas toujours à maîtriser… Cela m’épuise beaucoup psychologiquement… »

Pourquoi vouloir maîtriser ? Tu as encore de la réticence ou de la résistance à vider, à laisser sortir, à exprimer… « Vider » et tant que tu voudras « maîtriser ta colère et tes ressentis », tu ne pourras pas les vider.

Tu es épuisé parce que, par la volonté ou la peur, ou pour la bienséance,  bref à la force des poignets, tu retiens tout en toi, et tu te retiens ! Tu fais barrage à la « chasse d’eau » que ton être intérieur est en train de faire gonfler pour évacuer le bouchon derrière lequel tu t’es protégé face au danger, mais aussi tu t’es recroquevillé.

Ce qui remonte en surface, ce n’est pas de l’hyper sensibilité ! C’est ce qui crie en toi et que tu as fait taire trop longtemps. Si ça remonte si fort, c’est parce que ce qui crie en toi est prêt à sortir…

Si ça crie si fort en toi aujourd’hui, c’est que tu es prêt à l’écouter sans t’y noyer, à « lâcher » et à laisser entrer à sa place la sérénité et la reconstruction.

Il est temps de « vider », de « lâcher », si possible en te faisant accompagner de quelqu’un qui ne te donnera pas de conseil ni de directives, mais qui saura t’écouter et t’accueillir jusque dans ton cri et tes larmes, et qui pourra t’accompagner pour canaliser cette « vidange » jusqu’à y retrouver le soulagement, la libération et l’énergie du relèvement.

Bien à toi…
Marc                         Jaillissement130x81                                    mthomas@competences-relationnelles.com

Changer nos réactions automatiques

Tu m’écris :
« Savoir tout ce qui m’a blessé dans mon histoire ne suffit pas,
pour changer de comportement… »

EXACT, le savoir ne suffit pas au changement !

« Je sais qu’il faut que je mette en pratique tout ce que je sais… »
FAUX : c’est une injonction volontariste
qui aurait déjà marché depuis longtemps si c’était la bonne solution !

« Je me rend compte que c’est un combat quotidien… »
FAUX : le combat n’est pas la solution

« car j’ai ‘des réflexes dans mon comportement’
qui sont plus forts que moi.. presque naturels…
 »
EXACT ET C’EST LA DESSUS QU’IL FAUT TRAVAILLER !

Travailler cela non pas à la force des poignets,
ni comme un combat, ni comme « il faut agir » et faire des efforts.

Tu changeras quand tu auras interrogé et travaillé ces réflexes eux-mêmes
contre lesquels ta volonté ne peut rien.
Ce sont comme des programmes informatiques
qui ont été écrits sur ta « carte mémoire » interne.

Ces programmes déclenchent inconsciemment
des réactions réflexes et automatiques…
Tu as beau te dire qu’il ne faut plus réagir comme ça,
ça ne peut pas marcher durablement,
même avec de la volonté et des efforts,
parce que ton fonctionnement intérieur automatique reste le même
et finit toujours par gagner sur ta volonté.

Il s’agit donc d’aller  chercher en toi ce programme,
de trouver qui l’a écrit : ce n’est pas toi, c’est ton éducation,
et ce que tu dis ci-dessus de ta famille est un début de prise de conscience.

Lorsque cette prise de conscience est faite,
et en évitant l’accusation des parents
ou du « système éducatif » qui t’a programmé,
tu vas pouvoir confronter deux programmes :

  • le programme écrit sans ton accord,
    et qui fait aujourd’hui tes réactions réflexes plus fortes que toi
  • un autre programme que tu vas écrire toi-même,
    pour être en accord avec tes valeurs et tes projets…

En faisant cette confrontation dans une démarche de travail sur toi,
tu vas déprogrammer le programme ancien et le reprogrammer…
Ce travail se fait en partie inconsciemment.

Et tu vas découvrir étonnée que des changements se réalisent,
sans effort, sans combat, sans mobilisation de ta volonté,
mais simplement par un fonctionnement « à l’endroit »
du programme qui fonctionnait « à l’envers »…

Bien à toi…
Marc                         Jaillissement130x81                                    mthomas@competences-relationnelles.com

Sortir de la COLÈRE et traiter les BLESSURES

Couverture2SUBMERGÉS !

Parfois, les émotions négatives et les blessures sont si fortes que nous avons l’impression qu’elles nous envahissent totalement. Comme si notre force de vivre était anéantie par la douleur ou par la colère. Dans ces situations, il est nécessaire de vider le trop plein en laissant s’exprimer les ressentis douloureux. C’est la seule manière de désinfecter les plaies ouvertes ! Pour qu’elles se vident et laissent place à l’extension de notre être intérieur et de nos valeurs d’autonomie et de liberté momentanément contraintes. Laisser sortir ces sentiments quand ils se présentent, et tels qu’ils viennent…

DE VIELLES BLESSURES SE RÉVEILLENT

Quand nous nous donnons le droit de vivre une colère légitime, cela nous renvoie parfois à des évènements du passé très douloureux, mais qui n’ont pas été traités, peut-être parce que, à l’époque, nous ne nous sommes pas donnés le droit à la colère : nous l’avons enfouie ou elle nous a été interdite…

Cette résurgence d’évènements du passé dans une blessure d’aujourd’hui est souvent très éprouvante. Mais elle est aussi le signe que nous sommes maintenant mûrs pour nous en libérer : la colère d’aujourd’hui a ouvert la voie à d’autres libérations. C’est ce que j’appelle les mines antipersonnel, témoins de combats du passé, qui se réveillent chaque fois qu’un évènement semblable survient et les réactive… jusqu’à ce nous acceptions de les traiter, et donc de nous en libérer.

VIDANGER LA COLÈRE ET LA DOULEUR

Blessure d’aujourd’hui ou blessure du passé… La manière dont nous les exprimons n’est pas une parole raisonnée et distanciée. Car c’est le cœur qui parle sans être régulé par le mental. C’est un déversement d’affects, comme un vomissement qu’il faut laisser venir : nous vidons, nous « vidangeons » tout ce que nous n’avons pas digéré aujourd’hui ou jadis, nous nous libérons enfin, par la parole, les larmes, les cris parfois, de ce poids sur l’estomac que nous portons parfois depuis tant d’années, consciemment ou inconsciemment…

Parfois nous avons peur d’être submergés par la douleur ou par la colère si nous l’exprimons et de dire ou faire n’importe quoi. Nous pouvons aussi avoir peur des réactions des autres et de leur jugements… Alors, plutôt que de nous laisser aller à vider et à « vidanger » le trop plein émotionnel, nous l’enfouissons en nous et nous nous réfugions dans le silence et le mutisme. Nous restons parfois des années dans le malaise, rongés de l’intérieur par l’insupportable que nous avons enfoui. Comme si nous gardions des aliments avariés plutôt que de les vomir, jusqu’à l’intoxication alimentaire et à l’empoisonnement destructeur… De même nous préférons parfois garder en nous l’insupportable qui va nous ronger de l’intérieur et nous pourrir la vie. Nous nous taisons, pendant des années peut-être, notre souffrance ou notre rancœur nous mine de l’intérieur, et nous la ruminons. Finies la motivation, l’enthousiasme et la joie de vivre : nous voici aigris, dépressifs, acariâtres ou violents. Et même notre corps peut en être atteint jusqu’à de graves somatisations.

SORTIR LIBRE DE LA VIOLENCE

Oser « lâcher tout ça », quand ça vient parce que c’est mûr, c’est la seule solution pour traiter la colère et les blessures ! Vider et « vidanger », sans nous préoccuper des formes : laisser venir comme ça vient, sauf la violence… Lâcher par écrit ou par oral, selon le besoin du moment et ce qui nous permet d’être le plus vrai. Exprimer par des mots, des larmes et d’autres manifestations émotionnelles, si possible en présence d’une personne de confiance qui saura accueillir et nous aider à canaliser le trop plein : sans le prendre sur elle, sans le minimiser ni donner de conseils, elle est présente à nos côtés, d’une présence bienveillante, à l’écoute avec empathie, témoin à la fois de l’expression de notre douleur ou de notre colère et de cette vidange libératrice…

Seule réserve quand nous vidons la colère et la douleur : pas de violence, ni sur nous, ni sur les personnes ou les objets qui nous entourent. Si la souffrance nous a « cassés », et que nous « cassons » à notre tour, nous restons prisonniers du cercle vicieux de la violence au lieu de nous « réparer ». Il s’agit bien de sortir la colère qui nous habite, sans la projeter sur les autres. Nous ne la déversons pas pour régler des comptes mais pour nous libérer intérieurement. Non seulement sortir la colère, mais aussi sortir DE la colère ! En vidant la colère sans chercher à atteindre qui que ce soit, nous ressentirons le relâchement de la fin d’un combat, et un sentiment de liberté. Et nous assisterons, étonnés, au commencement de la cicatrisation de nos blessures.

Plus tu pourras écouter et exprimer ta colère sans accuser l’autre,
plus ta liberté reprendra sa place.

Plus tu écouteras ta tristesse,
plus tu pourras dénouer l’attachement  dont tu sors blessé.

Plus tu écouteras ta déception,
plus tu découvriras que l’énergie déployée dans cette situation n’est pas peine perdue,
car elle a développé en toi la force de te protéger,
de dire non et de renforcer tes choix…


PDF1Marc THOMAS
, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
25 août 2015

Grandir de nos contradictions

Dev-Hum-Couverture1Souvent en nous, des sentiments contradictoires se mêlent. A tel point parfois que nous ne savons plus où nous en sommes… Par exemple des sentiments de colère, de tristesse, de déception… et des sentiments de soulagement et de liberté. Selon les moments de la journée, nous passons instantanément de l’un à l’autre, où nous nous sentons « tiraillés » de l’un à l’autre…

Qui d’entre nous n’est jamais en tension contradictoire entre des choix à faire, des décisions à prendre, des attractions et des répulsions vis-à-vis de la même personne… ?

Une personne m’écrit récemment qu’elle reconnaît en elle deux postures contradictoires : la difficulté à accorder sa confiance qui la fait fuir à chaque sollicitation, et en même temps sa volonté de faire plaisir qui fait d’elle une proie facile pas assez méfiante…

Une autre me dit qu’elle se sent libérée et sans manque suite à une rupture amoureuse, et en même temps qu’elle a peur, si elle revoit son « ex », d’être attirée et de retourner avec lui…

Faut-il lutter quand nous sommes affrontés à des tensions et contradictions intérieures ? Faut-il toujours que les sentiments reconnus nobles l’emportent sur ceux qui nous paraissent négatifs ? Faut-il que la libération l’emporte sur la colère ou que le soulagement vienne à bout de la tristesse et de la déception ? Quand nous sommes dans ces sentiments ou postures contradictoires, nous nous traitons facilement de « girouettes » qui changent d’avis au moindre souffle et nous nous jugeons

Un ami m’écrit que tous les soirs en se couchant, il est résolu à dire ce qu’il veut vraiment à un proche… et que tous les matins au réveil, il ne trouve pas les moyens ou l’énergie de prendre la parole… Et il se traite lui-même de « lavette »…

Lutter n’est pas la bonne solution. Croire que la libération est bonne et que la colère est mauvaise est une erreur. Croire qu’un choix est bon et l’autre mauvais est la meilleure manière de se tromper de décision. Car le monde n’est pas divisé en bien et mal, bon et mauvais… Il y a en chacun des énergies capables de nous faire avancer, il y a des moteurs dans les émotions négatives comme dans les émotions positives.

Derrière les plus gros nuages, il y a toujours le soleil. Derrière la colère, il y a la capacité à dire non à l’inacceptable. Derrière la tristesse d’une rupture, il y a la valeur de la confiance donnée et de l’amour partagé. Derrière la peur, il y a le désir de réussir. Derrière le choix de la séparation, il y a le besoin d’autonomie et de liberté et parfois aussi de protection. Ces énergies cohabitent. Nous en faisons l’expérience chaque fois que nous nous sentons tiraillés entre deux pôles, deux décisions, deux ressentis… car nous ne sommes pas faits « tout d’une pièce » !

Il n’y a pas à choisir entre les deux, mais à accueillir et écouter chacun de ces pôles. Comme une lampe électrique a besoin des deux pôles, la phase et le neutre, pour s’allumer… Ces deux pôles peuvent faire de la lumière ou du court-circuit, mais aucun des deux n’est mauvais, les deux sont nécessaires !

Accueille chacun de ces ressentis, fais droit à chacun et distingue l’un de l’autre, sans jugement ni culpabilité. Écoute ce que chacun de ces pôles contradictoires dit de toi, de tes aspirations et de tes refus, de tes blessures et de tes espoirs, de tes échecs et de tes réussites, et de ces valeurs différentes qui se croisent au cœur de ton être. Écoute ce que chacun veut de bon pour toi. Même ta colère qui te fait dire non veut du bon pour toi, car sans elle tu ne retrouverais pas ta liberté, ou tu accepterais l’insupportable… Si tu ne cherches pas ce que ta colère veut de bon pour toi, tu risques de transformer cette colère en violence sur toi ou sur l’autre !

Lorsque tu auras accueilli tes contradictions et écouté ce que chaque pôle veut de bon pour toi, tu pourras les faire dialoguer, les mettre en négociation, et tu découvriras que ce qui t’apparaissait comme contradictoire peut maintenant coopérer, comme la phase et le neutre de l’électricité. Tu ne seras plus tiraillé, mais tu y ressentiras une nouvelle unité intérieure, nourrie de la diversité de tes courants…

Il y a quelques temps, une personne me parlait de ses grandes blessures intérieures depuis son enfance jusqu’à aujourd’hui. Après plusieurs rencontres où elle avait eu des discours très distanciés sur les évènements déclencheurs de ses blessures, elle a pu enfin exprimer ce qu’elle ressentait… jusqu’à une sensation douloureuse dans son ventre d’un grand tourbillon. Au quotidien, ce tourbillon la submerge, jusqu’à des colères destructrices. Elle venait de mettre des mots sur ses ressentis, de les écouter et de les exprimer, et son ventre se mettait aussi à parler en forme de tourbillon. Puis elle a mis ses mains sur son ventre, elle a pris ce tourbillon dans ses mains, plutôt que de se laisser prendre par lui. Elle fut toute étonnée de le ressentir aussitôt dans ses mains comme un filet d’eau qui caresse… Et quelques jours après, elle écrit : « Les choses s’apaisent et ça fait beaucoup de bien, même si c’est encore fragile. J’espère continuer … »

Marc THOMAS, Consultant Formateur en Compétences relationnelles,
13 août 2015

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Ressentir pour penser

Dev-Hum-Couverture1Nous avons appris à penser, à comprendre, à analyser… bref à développer notre intelligence « intellectuelle »… Mais nous avons peu appris à ressentir, à écouter nos colères ou nos désespoirs, à les accueillir, les apprivoiser et les canaliser…  bref à développer notre intelligence « émotionnelle »… Nos émotions ont souvent été suspectées de faiblesse : il fallait les faire taire et les « ravaler » jusqu’à la nausée…

Ne nous étonnons donc pas que ces émotions refoulées viennent parfois tout bouleverser, et suscitent tant de dégâts en nous et autour de nous : vagues qui nous submergent dans nos vies personnelles ; conduites agressives en famille ou au travail ; colères sociales qui enferment dans le « chacun pour soi » ; violences qui terrorisent quand on se croit humilié ou rejeté…

Il est de moments rares où l’émotion rassemble, plus forte que le « chacun pour soi », que l’opposition des opinions ou la peur de l’autre. Cette émotion qui rassemble n’est certes pas sans ambiguïté… Elle a aussi besoin d’être traitée pour se transformer en pratique quotidienne de l’union dans le respect de la diversité.

Mais seule l’émotion peut rassembler. Elle rassemble des personnes, si différentes parfois, dans la même joie pour la naissance d’un enfant, pour fêter les amoureux ou une réussite professionnelle… dans la même peine pour la mort d’un proche, dans la même stupeur face à la violence de la nature ou des évènements… Les humains sont très différents, mais leur ressentis se ressemblent. Pour penser juste, un humain a d’abord besoin de ressentir, d’être « sensibilisé », de se « sentir » concerné. Lorsque la pensée se sépare de l’émotion, elle devient « doctrinaire » et fondamentaliste. Lorsque l’émotion se sépare de la pensée, elle déborde jusqu’à l’agressivité et à la violence.

On peut combattre des opinions (par exemple le racisme), on peut débattre vigoureusement sur des idées différentes (par exemple les débats politiques). Mais ce débat d’idées tourne aussi très vite à l’affrontement idéologique, chacun cherchant à prouver qu’il a raison, et que l’autre a tort, parfois jusqu’à l’écrasement.

Au contraire, lorsque l’émotion est exprimée, accueillie et respectée, elle nous rapproche et nous identifie à l’autre : « condoléances » (au sens propre de souffrir avec, souffrir de la souffrance de l’autre), ou encore « Je suis… ». Les besoins de chacun sont reconnus par les autres et la recherche de leur satisfaction dépasse le « chacun pour soi » pour devenir solidaire.

Mais tout ce que je viens d’écrire peut rester des belles paroles et des théories figées… si nous ne l’exerçons pas au quotidien. Je vous propose donc un exercice pratique : quittez les discours qui justifient le positionnement que vous avez pris pendant les évènements de début janvier en France. Quittez ces débats tendus qui voudraient convaincre l’autre que vous aviez raison d’être ou de ne pas être Charlie…

A la place de ces débats stériles, faites le choix d’échanger avec respect sur ce que chacun de vous a ressenti dans ces moments là : qu’est-ce qui vous a choqués ? qu’est-ce qui vous a fait mal ? qu’est-ce qui vous a réjouis ?

Nous avons tous été choqués, mais ce ne sont pas les mêmes choses qui nous ont choqués. Nous avons tous « communié » dans la souffrance, beaucoup ont marché ensemble… mais nous n’avons pas souffert de la même chose ni marché pour les mêmes raisons. Nous nous sommes réjouis peut-être, mais pas forcément pour les mêmes motifs. Ces échanges donneront la parole à chacun, à l’unique condition d’accueillir les ressentis de l’autre sans les juger.

Nos chocs exprimés et accueillis sans jugements deviendront moins lourds  et pourront se transformer en motivation pour agir. Nos oppositions se transformeront en ressources et en complémentarités. Une intelligence émotionnelle nous permettra de penser et d’agir plus juste… et de rester ensemble.

Marc THOMAS, Consultant formateur en « Compétences relationnelles »
janvier 2015

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« Nul n’est blessé par un autre que lui-même »

Couverture2Cette phrase est écrite par le philosophe grec Epictète au 1er siècle. Bien sûr, je ne l’applique pas aux enfants abusés, ni aux femmes battues ou violées, ni à toute autre victime de comportements violents ou pervers !

Par contre, dans un certain nombre de tensions relationnelles ou de situations d’incompréhension, je crois que ce n’est pas d’abord l’autre qui nous blesse, mais nous qui ne savons pas nous protéger et qui nous laissons atteindre. Et nous nous sentons blessés !

Blessés par une parole dite par un proche, et pourtant celui-ci n’avait pas l’intention de faire mal. Mais ce qu’il dit réveille en nous une émotion ou une souffrance venue d’ailleurs et qui restait sensible. Ce n’est pas lui qui m’a blessé, c’est moi qui me suis senti blessé.

Blessés, nous devenons agressifs envers l’autre : l’agressivité vient quand nous-mêmes nous ne sommes pas bien ou que nous n’avons pas trouvé la manière de nous protéger devant une situation difficile.

A l’inverse, blessés lorsque quelqu’un nous agresse : nous pourrions nous dire que son agression ne parle que de lui et de son mal-être, car il aurait pu nous dire son désaccord ou son refus sans être agressif. Si nous sommes blessés, c’est que nous avons pris pour nous une accusation qui ne parle pourtant que du mal-être de l’agresseur.

Blessés dans des situations de conflits, quand nous nous épuisons à convaincre l’autre qu’il se trompe, et que l’autre en fait autant, quand nous nous acharnons à vouloir prouver que nous avons raison et qu’il a tort. Nous accusons l’autre de nous avoir fait du mal, alors que c’est d’abord notre acharnement qui nous a blessés.

Nous pouvons remplacer cet acharnement par l’acceptation de la différence de points de vue, choisir d’écouter le point de vue de l’autre, lui demander d’écouter le nôtre, proposer de chercher ensemble un compromis sans perdant. Même s’il n’accepte pas, nous serons moins blessés parce que nous aurons eu une attitude plus constructive.

Blessés par les jugements que nous portons sur l’autre, toutes les accusations qui fusent si vite en situation de tension. D’autres fois, c’est la peur du jugement de l’autre qui nous fait nous taire. Et nous ruminons en silence, nous installant dans le rôle de la victime blessée par l’incompréhension, le manque de reconnaissance, la soumission….

Nous pouvons décider une fois pour toutes de renoncer à tout jugement sur l’autre et sur nous-mêmes, de lâcher toutes les ruminations et ressentiments qui ne font qu’amplifier notre malaise comme une avalanche. Nous pouvons laisser à l’autre les jugements qu’il porte sur nous, et remplacer nos reproches et nos silences par des paroles en « je » : dire sans agressivité ce que nous pensons et ressentons, ce dont nous avons besoin, ce que nous demandons ou refusons…

Alors nous ne pourrons peut-être pas changer l’autre, car cela n’est pas en notre pouvoir. Mais nous changerons de place dans la relation : renonçant à prendre la place de la victime, nous choisirions de faire face, vrais avec nous-mêmes et devant l’autre… Nous ne nous blesserons plus nous-mêmes, nous déclencherons plus facilement le respect.

Marc THOMAS, Consultant – Formateur en « Compétences relationnelles »
avril 2013

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Intelligence des sens

Dev-Hum-Couverture1Quand j’étais au collège et que j’avais du mal à m’exprimer, mes professeurs me rappelaient la phrase du poète Boileau : « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire en viennent aisément. » Autrement dit, il faudrait d’abord clarifier ses idées dans sa tête avant de les exprimer.

Ceci peut se concevoir dans une démarche philosophique ou littéraire. Mais notre éducation nous a souvent faire croire qu’il fallait aussi appliquer cette maxime à nos questionnements personnels ou à l’expression de nos ressentis. Et beaucoup d’entre nous, dans le flou de leurs questions ou dans le débordement émotionnel, ont pensé qu’il valait mieux se taire tant que les choses n’étaient pas claires dans leur tête.

Pas étonnant alors que nous nous enfermions dans nos pensées quand le moral est en berne, et que nous nourrissions les rancœurs à l’intérieur plutôt que d’exprimer nos malaises. Ainsi le silence s’installe, les tensions intérieures nous rongent… et « les mots pour le dire », non seulement ne viennent pas aisément, mais ne viennent plus du tout.

Pour nos questionnements personnels et nos émotions, je préfère remplacer cette maxime de Boileau par une autre, écrite par le grand philosophe grec Aristote :

« Rien dans notre intelligence qui ne soit passé par nos sens. » Le vieil Aristote avait déjà retourné les choses dans le bon sens : nous sommes des êtres de chair et de sang. Nous avons cinq sens qui sont autant d’antennes et de canaux de communication entre notre monde intérieur et notre environnement.

Ce qui passe d’abord par nos sens, nos sensations, nos ressentis… construit notre intelligence et notre réflexion. En premier vient l’attraction ou la répulsion, une sensation de bien-être ou de malaise, un sentiment de joie, de peine ou d’inquiétude… Poser des gestes d’amour, s’émerveiller… Tout cela passe d’abord par nos sens pour rejoindre notre intelligence. Celle-ci se nourrit de nos perceptions, de nos sensations et de nos sentiments pour les comprendre et nous faire réagir avec la bonne distance…

Il en est de même pour la parole : si tu t’interroges sur toi-même, si tu es traversé d’émotions, n’attends pas de comprendre ou d’être calmé pour parler : ça ne marchera pas ! Seuls tes balbutiements et les mots qui jaillissent de tes sensations peuvent te permettre de décoder ce qui t’arrive et de clarifier tes idées. A condition que ces mots parlent de toi, et non des rancœurs vis-à-vis des autres.

Notre intelligence commence dans notre plexus solaire, lieu de nos émotions, et va jusqu’au cerveau, lieu de la réflexion. Quand le plexus et le cerveau sont disjonctés, balbutie les mots qui te viennent, pour dire ce que tu ressens, sans reproches ni violence : ils rétabliront la communication entre tes sensations et ton intelligence.

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
janvier 2013

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Comme des mines antipersonnels

Dev-Hum-Couverture1Dans son entreprise, Murielle est chef d’équipe. Elle exerce un management coopératif et les relations avec l’équipe se passent bien.

 Murielle a des chefs qui sont eux aussi coopératifs, prévenants avec elle et facilement accessibles. Mais dès qu’elle se présente devant tel ou tel de ces chefs, Murielle perd ses moyens et se sent écrasée.

 Murielle raconte cela en formation, ajoutant qu’elle ne comprend pas son attitude. Elle ajoute : « Je suis vraiment ridicule de réagir comme cela avec des chefs sympas ! »

 Je stoppe donc Murielle dans son jugement sur elle-même et je lui propose de chercher plutôt à comprendre : « Il y a des raisons pour lesquelles vous réagissez ainsi. Vous seule pouvez les trouver. » Rivée sur sa réaction devant ses chefs, Murielle ne trouve pas. Je l’invite alors à se demander si elle réagit de la même manière dans d’autres situations. « Oui, répond-elle, chaque fois que je me trouve devant quelqu’un de supérieur à moi. C’est comme si j’avais envie de disparaître sous terre. »

 Un autre participant intervient pour l’encourager : « Mais non, Murielle, tu n’as pas à t’écraser comme ça devant l’autorité. » Je stoppe cette personne malgré sa gentillesse car Murielle ne pourra pas faire autrement tant qu’elle n’aura pas trouvé d’où vient sa manière de réagir.

 Murielle cherche, silencieuse, puis son visage blêmit et se tend, des larmes coulent : « C’est ma maîtresse, à l’école maternelle : j’étais la seule élève du monde rural. Quand j’ai ouvert la bouche, la maîtresse a dit : de toutes façons tu ne peux dire que des bêtises, toi, la fille de paysan ». Silence, larmes, émotion… ouvrant une prise de conscience.

 C’était ça la mine antipersonnel, enfouie depuis plus de 40 ans : elle venait affleurer et exploser à chaque pas de Murielle vers une autorité. Il a fallu qu’elle prenne le temps et les moyens de s’écouter elle-même, grâce à la formation, pour prendre conscience de la bombe d’origine qui lui explosait au visage chaque fois que la situation se reproduisait.

 Murielle est revenue un mois plus tard terminer la formation. Elle nous a dit qu’elle avait été très fatiguée après cette prise de conscience, mais qu’elle avait dépassé la haine vis-à-vis de cette maîtresse. Et surtout, devant ses chefs d’aujourd’hui, elle se sentait déjà plus à l’aise, libérée.

 Et vous, quelles sont vos mines anti-personnel ?

Marc THOMAS, Consultant – Formateur en « Compétences relationnelles »
octobre 2011

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Accueillir et canaliser les émotions

Cet interview a été réalisé à l’initiative de « Église à la Réunion » en mars 2011, à l’occasion de trois formations  intitulées « Canaliser les émotions et s’en servir pour agir »