Chercher derrière nos jugements…

Couverture2Dans une formation, Catherine raconte une situation de communication difficile : sa fille vient voir des membres da sa famille élargie ; Catherine habite juste à côté, mais sa fille ne s’arrête jamais chez sa mère. Et Catherine ajoute: « Ma fille m’ignore ! » Cette phrase est une interprétation, voire un jugement de la conduite de sa fille, mais c’est la seule manière que Catherine a trouvé pour exprimer sa souffrance. Comme toujours dans un conflit, on parle de l’autre, souvent en l’accusant. Que de jugements et de reproches empestent les relations quotidiennes !

J’invite donc Catherine à parler d’elle plutôt que de parler de sa fille. Je lui demande : « Quand vous pensez à votre fille, de quoi auriez-vous besoin ? »  « Qu’on se reparle enfin après tant d’années lourdes de tensions et de conflits… Que je puisse lui dire que malgré tout cela je suis sa mère et que je l’aime… Que je puisse la serrer dans mes bras et lui proposer de renouer une relation apaisée… » Derrière le jugement de Catherine, il y a avait donc la souffrance d’une mère blessée et un besoin légitime d’exprimer son amour et d’entreprendre un chemin vers sa fille. « Ma fille m’ignore » voulait dire : « J’ai besoin de retrouver ma fille, malgré tout ce qui s’est passé. »

Puisque ce besoin est exprimé, reconnu et valorisé, je peux poursuivre avec Catherine : « Êtes-vous sûre que votre fille vous ignore ? Peut-être ne sait-elle pas comment vous aborder après tant d’années ? Peut-être imagine-t-elle que vous allez lui faire des reproches ? Peut-être a-t-elle peur… Il n’y a qu’elle qui sait pourquoi elle ne vient pas frapper à votre porte ! »

Catherine est bouleversée. Elle évoque discrètement les souffrances passées et découvre que son jugement sur sa fille n’était que l’expression maladroite de sa propre souffrance. Et que peut-être sa fille est elle-même dans la souffrance…

Deux jours après, Catherine me remercie par mail, elle évoque un peu plus les raisons de sa souffrance. Elle peut enfin exprimer et regarder en face cette souffrance, elle commence à en sortir : « J’ai commencé à entrevoir la façon de réagir positivement (…). Je vais essayer de renouer le dialogue avec ma fille, tout doucement, et je sais comment l’amorcer ! »

Quand tu souffres, arrête d’accuser l’autre ! Quand quelqu’un dit sa souffrance, arrête de vouloir le rassurer ou trouver des solutions à sa place. Quand tu souffres, tu as besoin d’une oreille accueillante pour pouvoir exprimer tes ressentis et tes besoins. Ensuite, sans jugement sur toi ni sur les autres,  tu pourras repartir vers ceux avec qui tu étais en difficulté, et tu pourras les laisser expliquer eux-mêmes les raisons de leur conduite, toujours différentes de ce que tu imaginais !

Marc THOMAS – Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
mars 2012

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Opportunité du conflit

Couverture2Sur un parking de supermarché, à St Denis de la Réunion, je repère une place ombragée, un peu étroite car le 4×4 voisin a empiété sur la place que je convoite. Je me gare, ma voiture ne gêne pas le conducteur du 4×4, mais son regard est menaçant…

Lui : « Vous ne pouvez pas vous garez ailleurs »
Moi : « c’est la seule place à l’ombre, et je ne gêne pas l’ouverture de vos portes »
Lui : « Mais la place est trop petite pour vous garer »
Moi : « Pas trop petite, mais étroite car votre véhicule est garé sur deux places de stationnement »

Lui  (peau noire d’un cafre réunionnais) : « Vous n’êtes pas chez vous ici ! »
Lentement, je sors alors de ma voiture, je m’approche de lui…
Moi  (blond aux yeux bleus métro-zoreil !) : « Pour moi, tous les êtres humains sont chez eux sur cette terre. Si vous arriviez dans ma région d’origine, je vous dirais : Bienvenue, vous êtes chez vous ».

Lui  (surpris) : « Et vous êtes d’où ? »     Moi : « De Lorraine. »
Lui : « Et moi je suis de Vendée… J’y repars ce soir.»
Moi (surpris à mon tour !) : « Ah bon, et où en Vendée ? »
Lui : « à… (je ne nomme pas la ville ici par discrétion) »

Moi : « vous êtes là-bas depuis longtemps ? »
Lui  « Ca fait 10 ans que je travaille là-bas.. »
Moi : « J’imagine qu’en Vendée, vous vous êtes senti discriminé parfois… Certains ont dû vous faire comprendre que vous n’étiez pas chez vous là bas… »
Lui : « Oui, ça c’est vrai ! »
Moi : « Tout homme est chez lui, n’importe où sur la terre. A condition qu’il n’arrive pas en conquérant ! »

Lui : « Mais vous faites quoi ici ? »
Moi : « Je suis venu travailler avec des réunionnais sur les relations humaines et la gestion de conflits. »
Lui : (grand sourire) « Moi aussi j’ai fait une formation à la gestion de conflit pour le boulot car je suis passé chef d’équipe. »

Moi : « Alors vous et moi, nous savons que c’est en se parlant qu’on règle les conflits ».
Lui : « C’est vrai ! Mais ce n’est pas toujours facile. »

Moi : « Allez, bon retour en Vendée ! Saluez les vendéens pour moi : c’est le pays où j’allais en vacances quand j’étais petit ! »

Lui et moi, nous nous serrons la main avec un grand sourire !

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
février 2012

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Quand je parles, est-ce que tu m’entends ?

Couverture2Ne vous est-il jamais arrivé de vouloir parler de quelque chose qui vous tient à cœur à un ami, et d’entendre celui-ci vous dire : « Ah oui, c’est comme moi… ». Et votre écoutant se met à vous raconter sa vie alors que vous aviez besoin d’être écouté…

Lorsque quelqu’un me parle, je l’entends, mais ce qu’il dit m’évoque des situations semblables que j’ai vécues, ou réveille des sentiments que j’ai moi-même ressentis… Par exemple, si j’ai des enfants et que quelqu’un me parle de ses difficultés avec un ado, je risque d’entendre ce qu’il dit à travers ma propre expérience avec mes enfants ados… Et je vais répondre à l’autre ce qui me convient à moi dans ma situation personnelle…

Mon expérience me permet de comprendre l’autre, mais elle risque aussi de m’empêcher d’entendre ce qu’il dit vraiment et qui ne parle que de lui. Il a un ado, moi aussi, et nous avons ensemble des difficultés relationnelles avec nos ados… Mais ce que veut dire la personne que j’écoute est toujours unique et spécifique, et différent de ce que cela m’évoque dans mon univers à moi.

Écouter, c’est toujours se décentrer de soi pour se centrer sur l’autre. Lâcher mes propres filtres. Laisser de côté mes interprétations qui ne parlent que de moi. Nommer mes ressentis à l’écoute de l’autre, mais les mettre de côté et les traiter ailleurs, pour que mes ressentis n’agissent pas comme un écran en l’écouté et moi, m’empêchant de ressentir ce que lui ressent..

Pour comprendre l’autre, je peux lui poser des questions (mais attention, ce n’est pas une enquête !). Je peux surtout reformuler : « Si j’ai bien compris, tu m’as dit que… » Si c’est juste, l’écouté se sent compris et entendu. Si c’est faux, il va lui-même corriger et me donner les précisions nécessaires.

Si vous voulez vraiment écouter l’autre, sans interprétations ni jugements, trois questions simples :

  • comment ça s’est passé de ton point de vue ?
  • qu’est-ce que ça t’a fait ?
  • de quoi as-tu besoin pour être bien ?

Ces trois questions permettent à l’écouté de parler à partir de lui ; elles m’empêchent d’interpréter à partir de mes repères à moi toujours différents des siens. Elles permettent à l’écouté de trouver lui-même ses solutions : s’il nomme ses besoins insatisfaits, nous allons chercher ensemble comment les satisfaire !

Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
novembre 2011

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Comme des mines antipersonnels

Dev-Hum-Couverture1Dans son entreprise, Murielle est chef d’équipe. Elle exerce un management coopératif et les relations avec l’équipe se passent bien.

 Murielle a des chefs qui sont eux aussi coopératifs, prévenants avec elle et facilement accessibles. Mais dès qu’elle se présente devant tel ou tel de ces chefs, Murielle perd ses moyens et se sent écrasée.

 Murielle raconte cela en formation, ajoutant qu’elle ne comprend pas son attitude. Elle ajoute : « Je suis vraiment ridicule de réagir comme cela avec des chefs sympas ! »

 Je stoppe donc Murielle dans son jugement sur elle-même et je lui propose de chercher plutôt à comprendre : « Il y a des raisons pour lesquelles vous réagissez ainsi. Vous seule pouvez les trouver. » Rivée sur sa réaction devant ses chefs, Murielle ne trouve pas. Je l’invite alors à se demander si elle réagit de la même manière dans d’autres situations. « Oui, répond-elle, chaque fois que je me trouve devant quelqu’un de supérieur à moi. C’est comme si j’avais envie de disparaître sous terre. »

 Un autre participant intervient pour l’encourager : « Mais non, Murielle, tu n’as pas à t’écraser comme ça devant l’autorité. » Je stoppe cette personne malgré sa gentillesse car Murielle ne pourra pas faire autrement tant qu’elle n’aura pas trouvé d’où vient sa manière de réagir.

 Murielle cherche, silencieuse, puis son visage blêmit et se tend, des larmes coulent : « C’est ma maîtresse, à l’école maternelle : j’étais la seule élève du monde rural. Quand j’ai ouvert la bouche, la maîtresse a dit : de toutes façons tu ne peux dire que des bêtises, toi, la fille de paysan ». Silence, larmes, émotion… ouvrant une prise de conscience.

 C’était ça la mine antipersonnel, enfouie depuis plus de 40 ans : elle venait affleurer et exploser à chaque pas de Murielle vers une autorité. Il a fallu qu’elle prenne le temps et les moyens de s’écouter elle-même, grâce à la formation, pour prendre conscience de la bombe d’origine qui lui explosait au visage chaque fois que la situation se reproduisait.

 Murielle est revenue un mois plus tard terminer la formation. Elle nous a dit qu’elle avait été très fatiguée après cette prise de conscience, mais qu’elle avait dépassé la haine vis-à-vis de cette maîtresse. Et surtout, devant ses chefs d’aujourd’hui, elle se sentait déjà plus à l’aise, libérée.

 Et vous, quelles sont vos mines anti-personnel ?

Marc THOMAS, Consultant – Formateur en « Compétences relationnelles »
octobre 2011

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Faire face à la violence

Couverture2C’était il y a quelques années, dans une administration, au bureau d’accueil du public. Un homme très grand et très fort, agacé par l’attente – et probablement par ses propres soucis et sa difficulté à canaliser ses pulsions – s’approche violemment du bureau d’accueil, commence à soulever ce bureau en insultant le professionnel qui était derrière.

Une jeune femme du même service voit son collègue en difficulté. Elle est physiquement sans défense, petite et fluette devant cet homme « armoire à glace » ; elle ne fait pas le poids et risque de se faire violenter. Elle-même raconte : « Je ne sais pas ce qui m’a pris, je me suis approchée, je l’ai regardé dans les yeux et je lui ai dit : « Ça suffit ! » Il m’a regardée du haut de ses 2 mètres, j’ai cru qu’il allait m’écrabouiller. Mais il a lâché la table, il a reculé et il m’a dit : « Excusez-moi ! »

Vu la différence physique, cette professionnelle ne pouvait pas répondre à la violence par la violence. Elle a pris le risque d’y répondre par la seule force qui peut désarmer : cette force qui vient vers le violent plutôt que de le fuir et qui restaure une parole là où seules les pulsions s’expriment.

Bien sûr, cette professionnelle a pris un risque que tout le monde ne peut pas prendre. Mais pourquoi son intervention a-t-elle désamorcé la violence plutôt que de l’attiser ? Pour deux raisons : d’abord cette parole : « Ça suffit » : une parole simple mais fondamentale, qui ne juge pas, qui ne menace pas. Simplement cette parole rappelle la règle, celle qui s’impose à tous pour le bien de tous, elle remet de la règle (et donc de l’humain) au cœur de la pulsion sauvage et destructrice. Une amie psychanalyste m’écrit : « Cette parole qui rappelle la règle est d’abord une parole qui « arrête ». C’est pour ça qu’elle est efficace, c’est parce qu’elle arrête le débordement de jouissance (dans la violence). L’outil de cet arrêt est le rappel de la règle, mais ce qui fonde cet arrêt, c’est la position interne de la personne. » (Béatrice GUITARD).

La deuxième raison qui a permis de désamorcer la violence est donc bien la posture de la personne. Cette femme est petite et fragile devant la force physique du violent, mais très probablement bien enracinée en elle-même ; la règle qu’elle rappelle n’est pas un ordre extérieur à elle qu’elle ferait appliquer par devoir : s’il en était ainsi, elle se serait sauvée, dépassée par la violence de l’autre, et ensuite elle se serait lamentée, elle aurait dénoncé les violents, la société… Mais elle est là face à l’homme violent, et elle rappelle une règle intériorisée. Elle disait qu’elle ne savait pas ce qui lui a pris pour oser aller à la rencontre du violent : ce qui lui a pris, c’est d’agir en plein accord avec le fond de son être qui refuse toute violence, sans jugement du violent. Tout son être se pose devant cet homme, sans aucune violence, mais avec une force d’être, de conviction et de parole. Tout sont être dit « ça suffit ».

Cette parole « congruente », c’est-à-dire accordée à tout l’être de la personne qui la prononce, est la seule force que les violents peuvent entendre ! C’est la seule force non violente qui peut venir à bout de la violence.

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
Septembre 2011

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Centré sur soi… Centré sur l’autre…

Couverture2A la fin d’une formation , un participant me disait : « Si je comprends bien, quand on est centré sur soi, on parle à l’autre en « tu », et quand on est centré sur l’autre, on lui parle en « Je ». C’est tout-à-fait ça !

Si tu es centré sur toi, tu vas dire à l’autre : « tu devrais faire comme ci ou comme ça… A ta place, je dirais ça… » Mais tu risques de projeter sur l’autre, sans l’avoir vraiment écouté, les conseils qui sont bons pour toi, les avis qui expriment ton point de vue… Tout cela ne parle que de toi…

Si tu es centré sur l’autre, tu vas d’abord chercher à comprendre : pourquoi pense-t-il cela ? Pourquoi ne voit-il pas la réalité de la même manière que moi ? Pourquoi prend-il cette position ? Lui seul le sait, et, en te le disant, peut le clarifier pour lui-même… Il a alors toutes les chances de trouver par lui-même, mais grâce à ton écoute, la solution qui est bonne pour lui…

Si chacun est centré sur soi dans un conflit interpersonnel, tu sais bien ce qui va se passer : chacun va chercher à convaincre l’autre qu’il se trompe, puis chacun va camper sur ses positions en jugeant l’autre, et cela se fait en « tu » souvent blessant : « Tu ne comprends rien… Avec toi c’est toujours pareil… Tu dis n’importe quoi… ». Et ce tu « tue » : il accuse, il juge à partir de MA vérité à moi (toujours partielle) que j’ai transformée en LA vérité universelle !

Si dans un conflit, tu peux te centrer sur l’autre, tu vas renoncer à convaincre et à faire passer le message : tu sais bien d’ailleurs que cela ne marche jamais, alors pourquoi te fatiguer ?! Tu vas chercher à comprendre les raisons qui le conduisent à penser, à ressentir, à agir autrement que toi. Dans la négociation, tu pourras aussi lui demander de t’écouter et tu parleras en « Je » pour lui dire comment tu vois les choses, ce que tu ressens, ce que tu proposes. Chacun de vous alors pourra dire : « Je suis d’accord, ou je ne suis pas d’accord… Je propose… Je demande… Je refuse… » Et si chacun peut être respecté dans son « Je », alors il y a toutes chances que vous puissiez trouver un compromis, grâce au respect mutuel…

Être « centré sur l’autre » demande une réciprocité : que l’autre accepte aussi de m’écouter et de respecter mon point de vue, mes ressentis, mes valeurs. Dans quelques rares cas, l’autre s’y refuse. Il faudra alors constater l’échec de la relation et se protéger des attaques possibles. Car il ne s’agit jamais de se soumettre à l’autre ni de se taire devant lui. Lorsque chacun accepte de se centrer sur l’autre, les deux ouvrent un espace où chacun peut s’exprimer et être entendu : ils se construisent ensemble les conditions d’une relation sereine et durable.

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
août 2011

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Pourquoi ?

Couverture2Une simple injure, probablement raciste, a suffit à déclencher un « coup de boule »  violent de Zidane sur un autre footballeur. A 10 mn de la fin de son dernier match international, en finale de la Coupe du Monde, au lieu d’être fêté par toute une foule, il quittait le stade exclu, la tête basse…. Pourquoi ?

Une pulsion sexuelle (si les faits étaient avérés) ou une manipulation perverse fait basculer un grand de ce monde accusé de crime. Il se retrouve menotté à la face du monde, plutôt que candidat à l’élection présidentielle… Pourquoi ?

Des stigmatisations ou des mal-être identitaires entraînent jusqu’au terrorisme. Chez nous, un lycéen poignarde son professeur ou l’un de ses camarades plutôt que de se découvrir capable de construire son identité autant que son avenir… Pourquoi ?

Un désir de puissance inassouvi conduit au harcèlement à l’école ou dans l’entreprise, ou à une conduite criminelle en voiture … Pourquoi ?

Des critères de rentabilité conduisent à faire pression sur des salariés jusqu’au suicide, ou à faire passer au second plan, parfois, la qualité des soins à l’hôpital… Pourquoi ?

 Le chacun-pour-soi nourri par une société de compétition suscite des conduites d’écrasements de l’autre pour être le premier à tout prix, et tant de violence dans des relations humaines. Chacun cherche à avoir raison sur l’autre, parfois à instrumentaliser ou à posséder l’autre… Pourquoi ?

Pourquoi ? Parce que nos instincts et nos pulsions demeurent toujours en nous à l’état sauvage, surtout si nous n’avons pas eu l’occasion d’apprendre que nous pouvons les canaliser. Parce que les frustrations peuvent nous rendre humains quand elles déclenchent notre motivation à rechercher ce qui nous manque ; mais elles peuvent aussi nous rendre inhumains quand elles se transforment en agression pour avoir tout, tout de suite et à tout prix. Parce que même quand tout nous sourit, nous ne sommes pas à l’abri d’une erreur ou d’une manipulation.

La mise en œuvre de deux conditions doit permettre de choisir d’humaniser nos pulsions et nos frustrations :

  • partout où nous vivons, choisir de restaurer le primat de la solidarité sur le chacun pour soi ;
  • faire de l’apprentissage des compétences relationnelles une matière fondamentale dans l’éducation : apprendre que les relations sont plus productives quand elles sont sereines est aujourd’hui aussi important que d’apprendre l’informatique.

C’est urgent !    C’est possible…                                                            

Marc THOMAS, Consultant Formateur en « Compétences relationnelles »
mai 2011

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Ambivalence

Couverture2Ces dernières semaines, j’ai été touché par les combats menés par les peuples arabes assoiffés de démocratie. Les mots qui me sont venus sont : convictions, solidarités, énergie d’un combat pour la liberté.

Ces dernières semaines, je me suis senti agressé chez nous, en ville, et spécialement à Paris où j’ai beaucoup circulé : chacun pour soi, forçant le passage pour avoir à tout prix priorité sur l’autre, stationnement n’importe où parce que ça m’arrange, même si ça crée un bouchon ; indifférence et laxisme de tel ou tel service de distribution, récrimination contre la société pourrie au moindre souci…

Bien sûr, pas question de caricaturer : dans les pays qui luttent pour la démocratie, il y a aussi des dérives guidées par des intérêts personnels ; et chez nous, il y a aussi des sourires, des personnes qui accueillent et construisent la fraternité.

Nous sommes des êtres ambivalents : la même main peut caresser ou frapper ; le même cœur peut aimer ou haïr ; la même frustration peut devenir motivation ou agression ; les mêmes français peuvent s’émerveiller du courage des tunisiens dans leur révolution pacifique et aussitôt se cabrer quand ces tunisiens cherchent à entrer dans nos frontières…

Entre les deux options de notre ambivalence, il n’y a jamais un long fleuve tranquille, mais une ligne de crête où l’équilibre est toujours instable.

Pour rester sur le versant ensoleillé et constructif de cette ligne de crête, les peuples arabes en quête de liberté nous ont donné les seules recettes efficaces : se serrer les coudes, et prendre des risques pour défendre nos valeurs.

Il est sûr que ces recettes, qui sont la survie des peuples en recherche de liberté, sont plus difficiles à mettre en œuvre dans nos sociétés démocratiques qui nous garantissent depuis longtemps la liberté et l’assurance tout-risque !

Puissions-nous profiter des restrictions engendrées par la crise pour abandonner nos comportements d’enfants gâtés et pour retrouver l’audace et la fraternité !

Marc THOMAS, Consultant-Formateurs en « Compétences relationnelles »
Avril 2011

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Accueillir et canaliser les émotions

Cet interview a été réalisé à l’initiative de « Église à la Réunion » en mars 2011, à l’occasion de trois formations  intitulées « Canaliser les émotions et s’en servir pour agir »

Canaliser les émotions et s’en servir pour agir

Dev-Hum-Couverture1Parfois les émotions nous débordent : le rire, les larmes, la colère, la peur, la jalousie… Elles semblent plus fortes que nous, et comme un torrent qui inonde, elles détruisent tout sur leur passage : perte de confiance en nous, agressivité et violence envers les autres, jusqu’à transformer l’amour en haine…

Comment maîtriser ce torrent destructeur qui nous emporte dans sa violence ?

Parfois les émotions nous enferment dans le silence et dans la honte, dans le mutisme et le désespoir, jusqu’à la souffrance intérieure et à la dépression. Croyant que personne ne peut nous comprendre, nous risquons alors de fuir cette souffrance en cherchant refuge dans l’alcool et les drogues, ou dans la violence contre nous-mêmes ou contre les autres.

Comment ouvrir les portes qui libèrent de ces enfermements ?

Et pourtant ce sont les émotions qui nous rendent humains : elles expriment nos désirs  et nos besoins fondamentaux d’êtres humains ; elles  donnent de l’énergie à nos motivations ; elles manifestent notre émerveillement ; elles nous emmènent à la rencontre de l’autre, de l’amitié et de l’amour ; elles nous alertent et nous protègent face aux risques de la vie…

Comment canaliser ce torrent de vie pour qu’il nous transporte et nous construise ?

Arrête d’abord de dire que tu es trop sensible… ce qui voudrait dire que tu es trop humain ! Souhaite apprendre à canaliser, comme on canalise une source pour garder toute sa vigueur et l’orienter vers la production d’énergie.

Ne t’interdis jamais une émotion, car une source qu’on veut boucher fuit par tous les bouts ! Quand on a appris aux garçons à ne pas pleurer, les larmes interdites se sont transformées en colère ou en violence et ils sont devenus machos !

Les émotions sont faites pour exprimer nos besoins vitaux d’être humains : en mettant des mots sur nos émotions, nos besoins légitimes peuvent être satisfaits. Si tu n’exprimes pas ton émotion, tu te réprimes ; ton émotion s’imprime en souffrance, puis tu déprimes.

Ne laisse pas les émotions s’accumuler. Donne-toi le droit de les exprimer au quotidien : pas n’importe où, ni avec n’importe qui, ni n’importe comment, mais avec quelqu’un qui peut accueillir tes émotions. Sinon elles vont pourrir en toi !

Si ton émotion déborde et te cogne en pleine face comme les vagues contre la falaise, écoute le message de cette émotion : elle ne parle pas seulement de l’évènement d’aujourd’hui qui n’est qu’un déclencheur ; elle réveille quelque chose d’hier imprimé en toi : des évènements qui t’ont marqué, que tu as peut-être enfouis, les laissant macérer et te pourrir la vie. Laisse cette émotion s’exprimer, pour comprendre, libérer, vider, calmer… et respirer enfin !

C’est grâce à nos émotions que nous entrons en contact avec le monde et avec les êtres vivants. Les brider reviendrait à nous déshumaniser. Ce sont nos émotions qui nous rendent intuitifs, compréhensifs et, finalement, vraiment intel-ligents !

Marc THOMAS, Consultant-Formateur en « Compétences relationnelles »
février 2011

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